dimanche 31 mai 2015

GoT S05E07 "Le Présent"


Sur le Mur
Tout le monde avait trouvé incompréhensible que Samwell Tarly ait laissé les dagues d'obsidienne dans la neige quand il avait tué un Marcheur Blanc il y a deux saisons (S03E08 "Second Sons"). Ici, on les retrouve en Dague de Tchekhov et on nous rappelle la vulnérabilité des Morts-vivants au cas où on l'aurait oubliée.

La scène de sexe est mal faite mais on s'y attendait depuis longtemps. Sam a perdu tous ses alliés sur le Mur et Jon part avec un plan très mal conçu, qui devrait le voir se faire "tuer" (en apparence). C'est la deuxième fois que Ghost sauve Sam (il l'avait déjà fait aussi Saison 3). Sam n'a pas l'air de partir pour Oldtown dans la série.

Les auteurs de la série ont dit en plaisantant que la mort d'Aemon était la première mort naturelle depuis le début de la série.

Le prochain épisode va être à nouveau avec des Sauvageons avec Jon Snow, ce qui risque d'être assez ennuyeux.

Dans le camp de Stannis Baratheon, la situation se détériore et Melisande demande officiellement à Stannis de lui sacrifier sa fille Shireen pour alimenter ses sortilèges. On va donc bientôt avoir droit à un Agamemnon & Iphigénie, même si Stannis refuse pour l'instant. On s'attend à ce qu'il cède même si on ne voit pas trop son intérêt s'il réussit à prendre le trône mais après avoir perdu sa seule héritière légitime. Il est vrai que comme elle est affligée par la grayscale, elle peut avoir du mal à épouser un noble.

A Winterfell
Quelqu'un sur RPG.net a comparé le personnage de Ramsay Bolton à Lucy dans Peanuts qui jure à chaque fois que cette fois, cette fois, elle ne retirera pas la balle pour faire tomber Charlie Brown mais où le gag reste toujours le même et où elle reste identique à elle-même. Ramsay et Theon sont des Lucy. On a droit à une désillusion sadique qui est un écho de celles qui avaient lieu pendant le lavage de cerveau de Theon quand il tentait plusieurs fois de s'évader. Au moins, on ne peut plus reprocher aux scénaristes d'avoir transformé toute cette histoire en une rédemption de Theon.

Je n'ai pas compris ce que Sansa avait ramassé sur la corniche mais j'imagine que c'est encore une fausse piste de Ramsay qui l'avait laissé là intentionnellement pour que Sansa puisse se faire l'illusion d'avoir une arme contre lui. Il a fait cela tellement de fois pendant la saison 3...

Sansa tente maladroitement de manipuler Ramsay en excitant sa jalousie contre sa nouvelle belle-mère Frey. Mais le résultat serait sans doute que Ramsay ne ferait que la violer encore plus souvent pour garantir un autre héritier mâle le plus rapidement possible.

Brienne de Tarth et Podrick risquent d'attendre pas mal de temps avant d'arriver. Le public risque de se lasser - surtout qu'on annonce que la Saison 6 va finalement reprendre l'intrigue extérieure sur le couronnement du Nouveau Roi des Fer-Nés.

A Port-Réal
La meilleure intrigue, et de loin. De très beaux dialogues entre Olenna et le Moineau, ou entre Olenna et Littlefinger. C'était déjà très bien dans le roman mais ils ont rendu la progression encore plus intéressante en ajoutant ainsi plusieurs complots supplémentaires.

Beaucoup de fans trouvent que cette version du Grand Moineau est trop clairement maléfique alors que le personnage du roman était plus ambigu. Je ne suis pas entièrement d'accord, je trouve ce Moineau assez réussi dans son mélange de sincérité de Savonarole et de rouerie perfide.

A Dorne
Cette histoire est la pire. L'idée de départ était déjà assez vague mais la réalisation a été encore plus décevante. La rencontre Myrcella-Jaime est vide et ensuite la scène de séduction entre Tyene Sable et Bron est presque grotesque d'autoparodie (sauf si ce poison si lent ne peut agir que suite à une érection). Mais j'avais prévu dans le dernier épisode qu'il mourrait empoisonné et je ne m'attendais pas à un antidote.

A Meereen
Toute l'histoire de Spartacus est assez longue mais c'est une date importante : cet épisode 7 de la saison 5, 47e épisode de toute la série, est le premier où la série vient de dépasser le dernier roman publié en faisant se rencontrer Tyrion et Daenerys (avec des détails assez différents du roman, comme la suppression de toute l'intrigue du "Faux" Aegon ou de la Naine Vengeresse). C'est assez grisant d'entrer en zone inconnue où "tout peut arriver".

C'est un des Spoilers fourni par les films pour les romans (en plus de la scène où on voyait un Marcheur Blanc transformer un des bébés sauvageons). Il y a aussi des Spoilers moins directs comme le fait que des intrigues non-adaptées sont donc sans doute non-essentielles (encore une fois, le Faux Aegon de Dance with Dragons, ou Coeur-de-Pierre).

samedi 30 mai 2015

[JDR] Monsters & Magic


Sarah Newton est une de nos plus prolifiques auteurs de jeux en ce moment. En plus de quelques romans, elle a déjà créé plusieurs jeux de rôle comme Mindjammer (Space Opera transhumaniste, règles tirées d'une version du système de FATE, qui vient d'avoir une 2e édition luxueuse) ou Chronicles of Future Earth (dans le genre Dying Earth, avec un mélange de l'Urth de Gene Wolfe et de la Tékumel de MAR Barker, règles tirées du Basic Role-Playing System). M&M a un but différent, de faire une synthèse entre FATE et du vieux D&D classique telle que tous les scénarios de D&D pourraient être (presque) directement adaptés de manière "rétrocompatible", tout en gardant un système plus souple et plus "moderne". Ce n'est donc pas exactement un "rétroclone" mais une sorte d'émulateur "quasi-clone".

Il y a d'autres jeux qui font semblant de reprendre le même système que le vieux D&D mais en lui donnant un sens assez différent, que ce soit Searchers of the Unknown de Snorri (qui inverse le procédé de D&D3 en attribuant aux PJ les règles simplifiées faites pour les PNJ - voir aussi une déclinaison plus complexe avec Oltréé!) ou plus récemment Exemplars & Eidolon de Kevin Crawford (qui accentue la différence PJ/PNJ pour rendre les premiers héroïques dès le 1er Niveau, en gros les Dés de Vie deviennent les points de vie des PNJ secondaires et à l'inverse les PJ ont des dégâts qui fauchent des hordes).

Comme j'aime bien faire de la généalogie des "Lignages" de règles (pour utiliser une expression du philosophe Gilbert Simondon sur l'évolution des objets techniques), il y a aussi quelques traces qui font penser à Tunnels & Trolls comme le fait d'unifier jet d'attaque et jet de dégât, comme on le verra ensuite (bien qu'il puisse s'agir aussi d'évolution parallèle - il faudra demander aussi à Gianni, qui est fan des deux jeux et qui contribue aussi à M&M).

Le système général M&M
Le système unifié dit des Effets consiste à lancer 3d6, y additionner des bonus et accumuler des points égaux à la différence entre le résultat et le seuil à atteindre (ce sont des Effets si c'est positif, des Conséquences en cas d'échec). 5 points d'Effets est un Effet Mineur, 10 points d'Effet est un Effet Majeur, etc. L'usage de 3d6 pourrait rappeler ce que font d'autres quasi-clones comme HackMaster ou Dragon Age. (ce dernier gère différemment le degré de réussite en ne le faisant dépendre que d'un seul dé, le "Dé Dragon", parmi les 3d6). Le fait qu'on accumule les points d'Effets peut rappeler plus l'économie des "Points d'action" dans Heroquest.

Dans M&M, le jet est modifié par les caractéristiques pertinentes et par la classe de personnage. Contrairement au D&D classique, les bonus de caractéristiques sont multipliés par deux si c'est la caractéristique principale de la classe (donc un Mage avec 18 en Intelligence a un bonus +8 là où le Guerrier avec 18 en Intelligence n'aura que +4).

Les personnages disposent de plus de "Traits" qui peuvent être plus ou moins spécifiques (comme des Aspects de FATE), ainsi que de ressources de quelques Points d'Héroïsme, qui sont peu nombreux (1 seul par Niveau, plus quelques cadeaux du MJ).

Le nombre important de bonus fait penser qu'au bout d'un moment quand les niveaux montent, les 3d6 vont jouer un rôle assez "neutre" (ce qui est peut-être une intention tirée de FATE).

Combats, Physiques ou Pas
Dans le combat, ce qui était d'habitude le "Dé de dégât" d'une arme devient en fait un bonus offensif (ce point me paraît finalement plus proche de T&T que de D&D, même s'il permet quand même d'utiliser des caractéristiques de scénarios D&D sans trop de modifications). C'est l'Effet qui décide du dégât et en dépensant des "points d'Effets", on peut aussi déclencher des Conséquences négatives sur l'adversaires ou gagner des avantages. La "Classe d'Armure" ascendante est égale à la Dextérité plus la valeur de l'armure.

En plus des Points de Vie "Physiques" (Constitution + le maximum de son Dé de vie), il y a des Points de "Résistance Mentale" (Sagesse + un Dé de résistance mentale) qui servent non seulement dans des combats magiques mais aussi dans des "combats sociaux" pour persuader quelqu'un. Cela donne une distinction intéressante où les Guerriers ont le plus de Points de coup physique mais le moins de Points de résistance mentale (et vice versa pour les Magiciens).

Cette différence fait que les scénarios anciens exigeraient un peu d'adaptation pour déduire des Points de résistance mentale ou bien des Traits en plus. L'inflation des Points de vie des PJ a eu aussi son effet pour les PNJ.

Certains objets peuvent avoir des "Dés de Dégâts mentaux" pour aider à impressionner (des vêtements nobles par exemple), alors que le statut social pourrait donner une "Classe d'armure mentale" contre certains types de persuasion.

[Je remarque que c'est notamment l'idée de "combat social" qui avait irrité RPGPundit et lui avait fait refuser de reconnaître un aspect "OSR" de ce jeu.]

La Personnalité et son évolution
Une grande partie d'AD&D a été conservée telle quelle, comme les 6 caractéristiques habituelles, des espèces ("races"), les classes ou les alignements (qui ont certes de nouveaux effets quantifiables). Un des changements dans l'Alignement est le double Alignement : un centre (Focus, une explicitation de l'interprétation de cet Alignement) et une tendance à dériver (Drift, un autre Alignement vers lequel on pourrait aller - un Loyal Bon peut indiquer s'il a des tendances Chaotiques Bonnes ou "Neutre absolu" par exemple). Un des nouveaux systèmes est que le personnage peut gagner des points d'Alignement central (qui lui donnent des bonus dans son intégrité et qui peuvent même en faire un Champion ou un Parangon de cet Alignement) ou des points de "dérive" (qui le font changer d'Alignement). On a en plus un But qui donne des Points d'expérience si on le réalise au cours de l'Aventure.

Un léger regret que j'aurais est de ne pas avoir abattu la "Vache Sacrée" des Points d'Expérience (ce qu'a fait Exemplars & Eidolons en divisant au moins par 100 les anciens seuils de Points d'Expérience). Cela a toujours été la partie administrative de D&D que je ne me vois pas utiliser sérieusement en jeu.

Les échelles de haut niveau
Une des originalités de M&M (1e édition) est qu'il a prévu dès le début des adaptations à la montée en niveaux, depuis les échelles "héroïque" (5e), "épique" (10e), légendaire (15e) et mythique (20e) - cela doit venir en partie de D&D4.

Le concept de "Construction" devient ici assez abstrait car le personnage de haut niveau peut "construire" aussi bien un Golem qu'une forteresse ou même un groupe de PNJ, une guilde, une société, une armée, voire un Plan entier au 20e Niveau. On reconnaît là la tendance dans les jeux FATE de quantifier de nombreux aspects hétérogènes de la réalité.

Comme dans d'autres jeux Indies, les possessions matérielles sont aussi traitées de manière plus abstraite et synthétique avec des "points de trésor" au lieu du détail de chaque pièce d'or (Oltréé aussi utilise un système de ce genre).

La Magie
Pour l'instant, j'ai eu l'impression que la Magie classique de D&D avait été peu modifiée (en dehors des jets d'opposition qui fonctionnent comme un Combat mental). Sur ce point, l'avantage de l'originalité reste du côté de LotFP parmi les clones qui ont réinterprété les sortilèges classiques.

Il y a un supplément Aperita Arcana de Travis Casey et Julian Stanley pour compenser en partie cela. C'est une extension assez générale avec aussi de nouvelles races originales mais il y a une partie sur la magie avec des classes comme Elémentaliste, Invocateur, Enchanteur ou "Mage de Sang", et de nombreux nouveaux sorts (p. 177-250).

Conclusion générale

Joli système hybride Indie-OSR, assez souple (l'auteur précise d'ailleurs que c'est assez modulaire pour qu'on sépare des parties qu'on préfère), avec une belle présentation (et des illustrations de gens comme Jennell Jaquays ou Eric Lofgren).

J'ai lu sur le forum CasusBelliNO l'opinion que le jeu risquait de s'écarter trop de ses deux modèles opposés à la fois, mais si on ne le compare pas seulement à FATE (que je ne connais certes pas bien), il occupe une position qui reste intéressante comme "émulateur" original.

Il n'est peut-être pas si rétrocompatible avec D&D sans travail que cela car il faudra ajouter des Traits aux PNJ pour connaître leurs caractéristiques. Dans la gamme des jeux Indies qui tentent de capter les conventions de D&D, la rupture paraît moins profonde par exemple qu'avec Dungeonworld (qui utilise le système d'Apocalypse World).

vendredi 29 mai 2015

Tanith Lee et la mythologie de Sandman


Dans Sandman (commencé en 1989), Neil Gaiman avait récupéré plusieurs personnages qui servaient de narrateurs à des anthologies d'histoires d'horreur comme Caïn, Abel, Eve, Mme Xanadu, les Trois Sorcières et Destiny. Puis il ajouta à Destiny six autres Endless Dream (Morpheus), Death, Destruction, Despair, Desire et Delirium, avant de jouer avec d'autres allégories comme Lucifer.

Dans le cycle de la Terre plate (1978-1987) de Tanith Lee, les Démons des Ténèbres principaux du cycle sont Keshmet (la Destinée), Azhrarn (Darkness, Désir, Péché - il est plutôt Lucifer mais ne cesse de tomber amoureux de mortel(les) avant de se lasser, un peu comme Morphée), Azhriaz (Fille d'Azhran, elle devient la personnification du Délire puis de l'Amour, principe fondamental au-delà du Mal, de la Mort et de la Folie), Uhlume (Death, la Mort - qui d'ailleurs veut abandonner sa charge comme Destruction et Lucifer chez Gaiman) et Chuz (Delusionl'Hallucination, la Folie, il tient aussi un peu de Dream mais il fera d'Azhriaz la personnification du Délire, jouant ainsi avec un enfant d'Azhrarn comme Desire tente de manipuler la progéniture de Dream).

Cela me fait penser que l'influence de Tanith Lee est plus importante que par exemple les Incarnations of Immortality d'Anthony, où on trouve des humains devenant des avatars de la Mort ou du Destin.

Le Pourquoi de la Rose et du Lys


On connaît souvent du poète allemand Johann Scheffler (1624-1677, qui prit comme pseudonyme monastique Angelus Silesius quand il se convertit au catholicisme) un bref poème cité par Heidegger (comme sens de l'Être) ou par Borges (comme sens de l'Art) : Cherubinischer Wandersmann, 1657 Livre I, 289:
                 Die Ros' ist ohn warumb
                 sie blühet weil sie blühet
                 Sie achtt nicht ihrer selbst
                 fragt nicht ob man sie sihet.

(La Rose est sans pourquoi, elle fleurit parce qu'elle fleurit, elle ne fait pas attention à elle-même, ne demande pas si on la voit)

Mais ce n'était dans le contexte ni le sens de l'être comme "indépendant de la Raison", ni le sens d'un art "désintéressé". C'était l'idée que la créature éclot "en Dieu" et doit s'abandonner à Dieu, réintégrer cette vie dans laquelle elle émerge. Il y a un "Pourquoi" ontothéologique très standard (le "Ce Par Quoi" de Boèce) chez l'Ange de Silésie et Heidegger feint de l'exclure pour y voir une dénonciation par avance du "Principe de Raison" (Nihil est sine ratione) que Leibniz va faire "éclore" aussi quelques douzaines d'années après ce poème.

                Die Rose
                welche hier dein äußres Auge siht
                Die hat von Ewigkeit in Gott also geblüht.

                La Rose
                que voit ici ton Oeil du dehors
                a déjà fleuri en Dieu de toute éternité (I, 108)

Pour Johann Scheffler, il y a donc un Pourquoi, mais qui est lui-même au-delà de tout Pourquoi (même si Heidegger a une tendance à considérer que toute la mystique rhénane depuis Maître Eckhardt - voire depuis l'apophatique dionysienne  - aurait déjà dépassé l'ontothéologie dès que Dieu, ou bien l'Âme, apparaît comme une forme de "Néant").

Le terme de "Rose" est profondément surdéterminé dans la poésie de l'Ange de Silésie car la Rose est à la fois nom ou métaphore pour le Christ, le Monde et l'Âme de la Créature. La Rose est certes éclosion, épanouissement, épanouissement, donation, amour, beauté (la Création, par exemple III, 87), mais elle est aussi épines et donc souffrance (la Crucifixion, III, 88), voire mort ("l'araignée suce son poison dans la rose", IV, 82).

Voir tout ce passage continu dans le livre III de ce Pélerin chérubinique, poèmes 86-89 :

86. Auch untern Dornen blühen. 
Christ
so du Unverwelkt in Leyden Creutz und Pein
Wie eine Rose blühst
wie seelig wirstu seyn!

 87. Dich auffthun wie die Rose.
Dein Hertz empfähet GOtt mit alle seinem Gutt
Wann es sich gegen jhm wie eine Ros' aufthut.

 88. Es muß Gecreutzigt seyn. 
Freund wer in jener Welt wil lauter Rosen brechen
Den müssen vor allhier die Dornen gnugsam stechen.

 89. Die Schönheit. 
Die Schönheit lieb' ich sehr: doch nenn ich sie kaum schön
Jm fall' ich sie nicht stätts seh' untern Dornen stehn.

Et il y a aussi peut-être un lien avec les Lys des champs chez Jésus dans le Sermon sur la Montagne, où le beau "Lys dans la vallée" n'est plus l'objet d'amour du Cantique des Cantiques (la Reine de Saba de Salomon) mais la créature qui s'abandonne à Dieu et dépasse le souci de soi, des biens matériel mais même de son propre corps : elle est au-delà de tout effort, de tout labeur mais ses pétales dépassent déjà les richesses des soieries, Eve ou fleur pré-lapsaire du Jardin, délivrée à la fois de la sueur du front et de ces vêtements extérieurs.

Καταμάθετε τὰ κρίνα τοῦ ἀγροῦ, πῶς αὐξάνει· οὐ κοπιᾷ, οὐδὲ νήθει·(Mathieu 6: 28) ou bien  κατανοήσατε τὰ κρίνα πῶς αὐξάνει· οὐ κοπιᾷ οὐδὲ νήθει·(Luc 12: 27).

"Considérez les lys des champs, comment ils poussent, ils ne travaillent ni ne tissent."

Dans ce passage du Sermon sur la Montagne, l'idée n'est donc pas que le Lys est sans "pourquoi" mais qu'il peut se fier à une donation gratuite et désintéressée. Jésus vient de dire qu'il faut (1) donner sans espérer en tirer un intérêt, (2) prier sans manifester extérieurement sa dévotion car Dieu sait déjà tout et donc aussi notre désir et si nous sommes ou pas sincères, (3) critiquer les possessions extérieures, (4) dépasser le souci de soi. (C'est pourquoi Angelus dit que la "Rose n'a pas d'attention pour elle-même"). En un sens, le Péché originel et la sortie du Jardin d'innocence sont donc aussi dans le mysticisme chrétien, depuis au moins le Gnosticisme, le fait que la connaissance avait donné une scission de l'apparence et de la réalité, ou de la pensée et de l'être ("la Rose ne demande pas si on la voit").

jeudi 28 mai 2015

1001 Nuits : Un Palais de marbre noir


Dans l'histoire du Pêcheur (ou l'histoire enchassée du Prince des îles noires ensorcellé, 7e Nuit chez Burton), ce Roi qui avait emporté sa grande épée, découvre au loin un bâtiment "de marbre noir" (dans l'édition Lang), "de pierre noire recouverte de fer" dans la traduction de Burton.


Illustration de l'artiste franco-britannique René Bull, 1912 (reproduite dans Arabian Nights Illustrated).

Pot au Feu


Dom Duff, "Kig ha Farz" ("Pot-au-feu" en breton).

mercredi 27 mai 2015

Quelques liens comics



  • Une bonne histoire de la Grandeur et de la Chute de l'Univers Ultimate de Marvel. It was so successful it made itself unnecessary.
    Ugh, Ultimates 3 et Ultimatum de l'abominable Jeph Loeb ont l'air d'être encore pires que tout le shockporn que fait Mark Millar. Un mauvais titre peut parfois gâcher tout un Univers !

  • Has DC Done Something Stupid Today?. Oui, il fallait un indicateur de leurs dernières gaffes.

  • Le cross-over de DC, Convergence était assez "ennuyeux" et répétitif (à chaque fois, prendre une série oubliée de DC depuis 30 ans et la remettre dans un combat avec une autre série), il n'a pas bien marché commercialement (je crois) parce que les lecteurs savaient qu'il ne serait pas "dans" la continuité. Mais j'ai pourtant aimé de nombreux aspects de Convergence, pour une raison assez idiote (qui devait être leur but) simplement la nostalgie de revoir des personnages aimés, même si c'est dans une histoire très médiocre. Et la conclusion (SPOILER OF COURSE) est finalement plutôt une bonne nouvelle - même si ce sera vite annulé, rebooté et inversé tous les 15 jours quand on connaît la politique éditoriale incohérente de DC.
    A l'inverse, Multiversity partait d'une idée bien plus intéressante que Convergence (un comic book circule entre les Terres pour annoncer de manière méta-référentielle un désastre frappant tout le Multivers) mais fut assez décevante dans sa réalisation (comme d'habitude chez Grant Morrison, qui a des idées mais semble souvent peu capable de les mettre en place dans un récit structuré). 

    Voir aussi cette note sur Convergence comme une "erreur de catégorie" par rapport au genre du Superhéros :
    We are all of us in the shadow of Supurman, whose perfection - contra Anselm of Canterbury - is predicated on his nonexistence, a necessary condition of his absence. He remains the first and only superhero, the absent father whose prophesied arrival still carries the promise of peace.
  • mardi 26 mai 2015

    Tanith Lee (1947-2015)


    Voir le site qui lui est consacré.

    Comme Tanith Lee a à peu près l'âge de ma mère, cela m'effraie un peu qu'elle soit déjà morte. Ursula Le Guin, née en 1929, a 18 ans de plus. J'avais lu The Birthgrave (traduit en français d'abord par Elizabeth Vonarburg puis chez Marabout : "Le réveil du volcan" puis dans l'édition J'ai Lu "La déesse voilée") enfant et cela m'avait paru assez difficile à cette époque (tout comme Les Chroniques de Tornor d'Elizabeth Lynn), je devrais le relire aujourd'hui. Hélas pour elle, elle disait récemment dans une interview qu'elle avait encore du mal à se faire publier (en partie parce qu'on considérait qu'elle avait joué sur des thèmes "queers" ?), et qu'elle écrivait donc presque uniquement pour le plaisir (un peu comme le fait Brian Stableford, qui publie maintenant quasiment sans en tirer de royalties).

    Dans cette autre interview, Tanith Lee raconte un élément formaliste presque "rousselien" dans la rédaction de son "Dit de la Terre Plate" :

    IFP: What was the inspiration for the Flat Earth series?

    TL: The inspiration was, as I explain in my intro to the Norilana edition of Night’s Master, a word game I was playing with my mother, back in the 70s. Her clue to me was locked in the phrase “Go nowhere on a horse that fades”. This quickly translated into an idea for the first story in the book, (“Light Underground”). Other stories followed. And other books in the Flat Earth library. A lot of my inspirations have come from such so-called small things.
    Night's Master (1978 - traduit d'abord en français avec un roman gothique Sabella qui n'était pas dans le même univers) est le premier volume du cycle de la Terre plate, et l'originalité est de composer plusieurs histoires reliées comme si c'était un récit oral ou une compilation à la Mille et une nuits où la Conteuse avouerait qu'elle cherche à nous surprendre.

    Sur la Terre Plate, les Dieux dorment, mais les Dieux des Ténèbres, eux, peuvent être actifs et le premier cycle est centré sur Azhrarn, le Prince des Démons (ou "Ajrarn" en français), qui vit sous la Terre plate, au-dessus d'Uhlume le Seigneur des Morts. Le premier mythe ressemble à un mélange de Ganymède et d'Orphée : Azhrarn enlève, sous forme d'aigle, un beau jeune homme, lui donne une femme et tue ensuite le garçon, créant un collier de sept perles maudites avec les larmes de la jeune fille. Puis un poète réussit par son chant à prouver à Azhrarn qu'il a besoin de cette humanité qu'il veut manipuler et s'unira à la jeune fille aux Sept Larmes.


    Dans un autre cycle, Azhrarn va suivre de près le destin de Zorayas, jeune fille qui sera défigurée et réussira à obtenir (de force) d'Azhrarn la beauté parfaite.

    Dans Dragon Magazine n°30, octobre 1979, Lawrence Schick & Tom Moldvay adaptent les caractéristiques de cette Zorayas (p. 32). Voici donc sa fiche pour D&D :

    Zorayas
    Magicienne du 23e Niveau
    CA -3 (armure démoniaque)
    HP 40
    Alignement : Loyale-Mauvaise
    Force 7
    Intelligence 18 (93%)
    Sagesse 17
    Dextérité 6
    Constitution 10
    Charisme 18 (00)

    Zorayas est la 13e fille du Roi Zorashad de Zojad, dont le royaume fut détruit pour son hubris. Horriblement mutilée, elle fut élevée par un guérisseur et tenta au départ de reprendre la même fonction que ce père adoptif mais son apparence horrible la rendait haïssable de tous. Elle se tourna vers la démonologie et se fit fabriquer par des forgerons démoniaques une armure pour cacher sa laideur. Elle reconquit ainsi tout l'Empire de son père et força Azhrarn à lui donner une apparence parfaite (d'où le score en Charisme). Quand elle retire son masque, son visage agit maintenant comme un sort de Charme. Depuis, elle est devenue une agente du Prince du Mal Azhrarn sur la Terre plate et a perdu son innocence.

    SPOILER : Dans ce premier volume, Zorayas sera détruite à cause de cette beauté parfaite, à nouveau en imitant un mythe grec bien connu. [Les romans suivants dans le cycle auront plus d'influence mésopotamienne.]

    Et juste pour voir ce que pouvait une Magicienne du 23e Niveau en 1979, elle a ces 43 sorts :
    Spells
    1st Level Burning Hands Detect Magic Sleep Magic Missile Shocking Grasp
    2nd Lvl Detect invisibility Fools Gold Mirror Image Web Wizard Lock
    3rd Lvl  Dispel Magic  Fireball  Fly Monster Summoning I Phantasmal Force
    4th Charm Monster Hallucinatory Terrain Minor Globe of Invulnerability Monster Summoning II Polymorph Other
    5th Animal Growth Conjure Elemental Distance Distortion Monster Summoning III Transmute Rock to Mud
    6th Death Spell  Geas Monster Summoning IV   Spiritwrack*  Tenser’s Transformation *
    7th Cacodemon* (son armure), Monster Summoning V Reverse Gravity Simulacrum Vanish
    8th Trap the Soul* Polymorph Any Object* Monster Summoning VI Otto’s Irresistible Dance Maze
    9th  Power Word, Kill*   Monster Summoning VII   Imprisonment*  

    Add. 
    Marcus Porcius a consacré de nombreux posts de son blog à des nouvelles de Tanith Lee. 
    Un portrait de Narasen la Reine Léopard dans Death's Master (et qui finira en améliorant encore le sort d'Innana/Ishtar : au lieu de ressusciter, elle conquiert les Enfers). 
    Le philosophe Gene Hargrove (fan de Tolkien) relit tout le cycle de la Terre plate et fait une comparaison intéressante avec le Silmarilion. D'ailleurs, ceux qui n'aiment pas le Silmarilion ou les recueils de contes n'aimeront pas non plus ce cycle, qui ne ressemble pas du tout à un roman moderne. 

    lundi 25 mai 2015

    Year 1 A.F. (After Ford)


    Les auteurs de la nouvelle édition de RuneQuest (dite "RQVI") sont britanniques et canadiens et ils sortent un nouveau supplément pour jouer dans l'univers de Luther Arkwright (la bd de Bryan Talbot où on joue des agents à travers le Multivers dans une ambiance à la Jerry Cornelius, Gideon Stargrave ou Casanova Quinn - ou comme le jeu français MeGa, peut-être). La bd de 1987 (qui eut des ébauches dès 1978) avait des allusions à la politique britannique des années 1980 et il est inévitable qu'il y ait une adaptation 30 ans après. Une des Terres parallèles a une version dystopique de l'ancien Maire de Toronto, Rob Ford, qui vient dans notre continuum d'être remplacé par un nouveau maire tory (qui s'appelle John Tory - je conseille à Nicolas S. de se faire appeler "Nicolas Républicain", cela marchera peut-être).

    samedi 23 mai 2015

    [Glorantha] Interview de Ian Cooper pour The Coming Storm


    Chez La Voix d'Heort

    L'Apprenti Sorcier de Lucien


    1 Technicien & magicien
    On appelle à présent "magie" ce qui n'est pas en réalité une technique, ce qui exprime un rapport immédiat sans la soigneuse médiation des causes aux effets (cf. chez Alain, la connotation toujours négative de la "magie" comme digne de l'enfant tant qu'il ne travaille pas et ne connaît pas encore les lents efforts face à la matière). Mais la magie était rêvée comme une technique et les techniques rêvaient de s'étendre vers une magie. Les vrais forgerons se croyaient alchimistes (même si ceux qui se détachaient du travail de la matière devait prolonger une alchimie plus livresque), Hephaïstos était aussi magicien et faisait des chaises volantes ou des servantes en or (Iliade 18, 417) et Dédale, notre Premier Ingénieur après Imhotep, faisait des statues ambulantes et un Talos de métal (et sur ce point Wiener exagère un peu en opposant la vision "positive" du Golem à un mythe faustien plus technophobe puisque Talos semble bien plus contrôlé que le Golem).

    2 Simulacres, Spectres & Serviteurs
    Dans les deux cas, "technique" comme "magie", il s'agit de réussir à fabriquer des "serviteurs" de plus en plus parfaits pour nous délivrer du travail. Les Egyptiens faisaient de petites Effigies (ushabti, shawabti - le rapprochement avec l'Apprenti-Sorcier était fait aussi sur ce blog), des Figurines qui devaient servir le mort dans l'Au-delà. Et les tombeaux égyptiens étaient emplis d'armées de ces statuettes pour assurer le service post mortem. Si son âme, son ba et son ka étaient séparés de son corps, ces simulacres devaient aussi pouvoir assurer les besoins fantômatiques. L'Egypte n'est pas seulement dans notre imaginaire le monde funéraire des Grandes Tombeaux (et des Signes comme sépulcres de la signification) ou de l'asservissement colossal de masses d'esclaves qui rendait possible ces grandes réalisations. Le Tombeau valait alors comme symbole du despotisme (ou d'une Nécrocratie) : on sacrifiait la base pour permettre l'ascension du sommet de la Pyramide. Et le "Pays Noir" (Kemet) est aussi dans l'imaginaire la terre de l'hermétisme (les Magiciens des Mille et Une Nuits sont souvent égyptiens, ce qui prouve bien que le pays y restait l'Autre du monde arabo-persan et gardait une fonction assez obscure).

    La Magie dans cette tradition est alors une volonté de faire une technique d'esclaves invisibles.

    3 Prose & Pseudos
    On s'attend toujours à ce que la Poésie émerge lentement de la gangue de "la Prose du monde" par un processus de civilisation et de culture, mais on est étonné parfois de se rappeler à quel point c'est l'inverse. Le texte était en vers pour être digne d'être mémorisé avant qu'on conçoive de le laisser en prose, de même que le fait dut se construire contre l'intuition du mythe. Sans vouloir trop croire les thèses de Rousseau et Nietzsche à ce sujet, la littérature semble plutôt commencer dans la métaphore poétique (et donc la construction d'abstraction du monde) avant de conquérir de plus en plus progressivement l'épaisse concrétude ou la rigueur austère du Prosaïsme. C'est fait notamment par l'humour ou l'ironie, car c'est par la comédie qu'on subvertit ces métaphores - le cas le plus célèbre étant le roman avec Cervantes. Il faut passer par les diatribes du Cynisme avant de dégonfler notre soif d'Idéalisme éthéré.

    C'était notamment le programme des premières "Lumières" au IIe siècle chez Lucien de Samosate, première incarnation voltairienne où le ridicule doit nous guérir de notre propre désir fasciné et mystifié pour les Gourous (y compris Gourous philosophiques) et pour les Mythes. Nous sommes des enfants qui aiment les mythes et Lucien, au lieu de les critiquer sérieusement, joue avec pour mieux les démystifier (ce qui est sans doute une bonne méthode indirecte pour nous immuniser aux discours délirants, les prolonger jusqu'à leur épuisement). Le thème récurrent de toute sa rhétorique est les imposteurs et notre propre goût pour leurs mensonges. Et en un sens, son ironie contre les philosophes semble être une réponse de la rhétorique spéculative à la philosophie : et si c'était la philosophie qui ne se défiait pas assez de sa propre propension aux sophismes alors que la littérature, amatrice de faussetés, n'en serait pas dupe.

    [Nietzsche a trouvé dans un autre dialogue "ménipé" de Lucien qui parodiait le Mythe du Jugement des Morts dans le Gorgias, La Traversée ou le Tyran (16), l'expression de Sur-homme, ὑπεράνθρωπός, mais son utilisation sera assez différente : chez Lucien, le Juste dit qu'il croyait que le Tyran était semblable à un surhomme, "à quelque homme au-delà de l'humain et triplement bienheureux" (ὥστε ὑπεράνθρωπός τις ἀνὴρ καὶ τρισόλβιός) alors qu'il découvrira ensuite que l'immoralité du Tyran cause sa perte. L'Übermensch nietschéen sera un Maître "Kuonique" qui aurait dépassé cet arrière-monde des ombres de l'Hadès et qui pourrait boire l'innocence juvénile du Léthé au cours même de cette vie, qui aimerait assez les Trois Moires pour ne plus redouter le choix de sa destinée. ]

    4 Crédulité & Enchantements

    Dans son dialogue Philopseudès (l'Amateur de Mensonges) ou l'Incrédule, le terme même de philosophie est ainsi ridiculisé par le Sophiste de Syrie en mythomanie. Les érudits philodoxes ou pseudosophes s'habituent à ne plus distinguer le vrai de ce qu'ils veulent imaginer.

    Et c'est là dans ce Philopseudès, les Amis du Faux, sur la superstition que Lucien invente la figure de notre impuissance à remettre "le Génie dans sa Boite", à contrôler ce processus magico-technique de domination des objets, où le Travail dévié devient catastrophe, où les eaux détournées pour nettoyer les écuries d'Augias deviennent un Déluge.

    On fera ensuite de son récit de l'Apprenti-Sorcier une leçon de morale contre les Techniques alors qu'il s'agissait d'une fable contre notre goût pour la Magie. Le conte ironique d'un libre-penseur contre le Surnaturel est retourné en discours sur la maîtrise de nos instruments.

    Le personnage de Tychiade l'Incrédule (qui semble, par son éloge de Démocrite être plutôt un épicurien ou Lucien lui-même) se rend chez Eucrate, qui est affligé de la goutte et dont le nom ("Qui Peut Bien") est souvent celui de l'hôte crédule dans les dialogues lucianiens (Hermotime, Songe, Dialogues des morts). Tychiade se moque alors chez Eucrate de ses amis sectateurs de philosophie qui semblent tous avoir du goût pour le "paranormal", Ion le Platonicien, Cléodème le Péripatéticien (qu'on retrouve aussi dans le Banquet ou les Lapithes), Dinomaque le Stoïcien, Arignotos le Pythagoricien et Antigonos le médecin (qui semble au début un peu plus sceptique que les autres sur les remèdes, avant de tomber lui aussi dans un culte superstitieux d'Hippocrate). Ils racontent tous les uns après les autres des histoires de merveilles et de spectres et ensuite, c'est Eucrate lui-même qui vient racontre l'histoire de l'Apprenti-Sorcier (chapitres 33-35, dans cette traduction de Ph. Renault) :

    EUCRATE : Quand j'étais jeune et que je vivais en Égypte, où mon père m'avait envoyé pour poursuivre mes études, je voulus remonter le Nil jusqu'à Coptos, afin de contempler le célèbre Memnon, et écouter le son miraculeux qu'il émet tous les matins. Or, rien que pour moi, la Statue, loin de me livrer un son inepte, comme il fait pour le commun des mortels, me fit l'honneur d'un oracle en sept vers, sur lequel je ne vais pas m'étendre.

    Comme je remontais le Nil, j'eus le bonheur de voyager en compagnie d'un citoyen de Memphis, un scribe doué d'une sagesse inouïe et fort versé dans la science égyptienne. On me disait qu'il avait vécu vingt–trois années dans les cryptes des temples et qu'il avait acquis un savoir magique dispensé par la déesse Isis.

    – Mais il s'agit de Pancrate, mon grand maître, ajouta Arignotos [le Pythagoricien] : quel homme divin ! Il rasait son crâne, s'habillait de lin, toujours en méditation. Il savait un peu de grec, était grand, avait un gros nez, des lèvres épaisses, des jambes maigres.

    – C'est tout à fait son portrait, dit Eucrate, c'est Pancrate ! Au début, il m'était inconnu. À force de le voir pratiquer des prodiges à chaque escale, chevauchant des crocodiles et nageant dans le Nil au milieu des bêtes féroces qu'il impressionnait, j'eus vite la conviction que c'était un saint homme. Je voulus en faire un ami et j'y parvins si bien qu'il me révéla tous les secrets de son vaste savoir.

    Un jour, il me demanda de laisser tous mes serviteurs à Memphis pour l'accompagner seul, me disant « que nous ne serions pas en pénurie d'esclaves ». C'était vrai.

    Quand nous étions dans une hôtellerie, il ôtait la barre de la porte ou s'emparait, soit d'un balai, soit d'un pilon, et il l'habillait de quelques guenilles. Ensuite, il lui jetait un sort en prononçant une formule incantatoire : alors, l'objet se mettait à marcher avec une telle aisance qu'on eut dit un humain. Cet esclave, d'un genre très particulier, puisait l'eau, préparait les repas, faisait le ménage et nous servait avec un soin extrême. Lorsque Pancrate n'avait plus besoin de ses services, il lui rendait son état originel de balai ou de pilon en prononçant une nouvelle formule magique. 

    J'étais émerveillé par cet enchantement, mais je ne pouvais obtenir la formule qu'il gardait secrète. Certes, avec courtoisie, il refusait toujours de me la dévoiler. Un jour, à son insu, tapi dans l'ombre, je parvins à entendre la fameuse incantation. C'était un mot renfermant trois syllabes. Peu après, Pancrate dut sortir pour affaires à l'agora : auparavant, il avait donné ses consignes au pilon.

    Le lendemain, l'Égyptien étant à l'agora, je saisis le pilon ; je lui enfilai quelques hardes, comme d'habitude, prononçai les trois syllabes miraculeuses, puis lui ordonnai d'aller chercher de l'eau. Le pilon m'en rapporta une pleine amphore. 

    « Très bien, dis-je, il y en a assez, redeviens le pilon d'avant. » 

    Mais – c'est là le problème – il refusa de m'obéir et continua à puiser de l'eau, sans aucun d'état d'âme, jusqu'à ce que la pièce fut inondée. J'étais désemparé, vous le pensez bien, et mortifié à l'idée de mettre en colère mon ami Pancrate. Je n'avais pas tort. 

    Je pris donc une hache et coupai le pilon en deux. Hélas ! deux morceaux de bois se dressèrent aussitôt, qui prirent chacun une amphore et allèrent puiser de l'eau. J'avais désormais deux serviteurs en action, au lieu d'un. 

    Pancrate revenu, il devina la cause de cette pagaille, et rendit à ces porteurs d'eau leur forme première. Quelques jours plus tard, l'Egyptien disparut. Je ne sais pas ce qu'il est devenu.

    – Tu as appris au moins une chose, lança Dinomaque : humaniser un pilon.

    – Tout à fait ! Ou plutôt, je ne sais le faire qu'à moitié, car je ne peux pas lui rendre son état d'origine. Que je le transforme en porteur d'eau et voilà ma maison sous les flots !"

    Une autre source de ces objets qui vont chercher de l'eau serait peut-être une comédie perdue d'Eupolis, la Race d'Or, qui évoque cela dans un fragment. Le Pilon qui se multiplie quand on essaye de le détruire doit venir de l'Hydre de Lerne dans les Travaux.

    Le Sorcier égyptien et pythagoricien, initié d'Isis s'appelle Pancrate (Peut-Tout). Daniel Ogden propose dans Acta Classica 47 (2004), que ce Pancrate pourrait être inspiré par un mage égyptien nommé Pancrates ou Pachrates qui aurait servi l'Empereur Hadrien vers l'an 130 (Lucien, né sous Hadrien, écrit sans doute dans les années 160-170 et il a quitté Samosate et Antioche pour vivre peut-être à Alexandrie en Egypte - l'Egypte demeure pourtant pour lui un lieu d'exotisme et de superstitions). L'Empereur Hadrien avait d'ailleurs manifesté la même fascination qu'Eucrate envers ces Colosses Sifflant de Memnon. Les Trois Syllabes que Pancrace prononcerait serait d'ailleurs selon D. Ogden peut-être le mot même U-Shab-Ti ou Shab-Wa-Ti. Un jeu de mots sur le nom de Pancrate pourrait aussi être le fait qu'il y avait eu quelques années avant un Cynique nommé Pancrates (qui donne aussi quelques influences d'un autre Cynique, Cratès tout court). Tout le dialogue rappelle le genre de la Satire ménipée, style cynique de Lucien et le prétendu Mage porte alors le nom d'un Maître en démystification.

    La morale de l'Apprenti-Sorcier de Lucien est donc un peu différente de celle du poème de Goethe. Chez Goethe, l'Apprenti a eu le tort de se prendre pour le Maître mais le Maître, lui, a le savoir - et rien n'interdit donc au disciple patient d'espérer la même maîtrise du Sortilège et de ce Balai ou Pilon-Esclave. Le problème est l'hubris de l'élève et non dans la Technique elle-même (et il n'y a aucune révolte des Robots, une fois qu'ils sont bien réglés). Alors qu'ici, dans le contexte de la satire, l'Apprenti Eucrate est soit mystifié par le Maître Pancrate, soit il est en train de galéger dans son récit tout en nous faisant croire qu'il n'en est pas le héros. 

    vendredi 22 mai 2015

    Perfectionnisme et Page blanche


    Cela ne m'étonne pas vraiment qu'un journaliste, qui avait un désir clair et exigeant d'être un écrivain ait pu ainsi venir tous les jours au bureau pendant 32 ans (de 1964, à 56 ans, à sa mort en 1996) au New Yorker sans jamais réussir à livrer un seul article.

    Son dernier livre-reportage avait été un portrait d'un artiste qui avait justement un blocage pour se remettre à écrire, et ce texte finit par détruire toute capacité de continuer. Il venait tous les jours, passait toutes les heures de bureau à couvrir des feuilles de brouillon écrites à la main et les jetait à la corbeille.

    Mais cela m'émerveille que l'hebdo américain ait eu assez d'estime pour l'écrivain et ses textes antérieurs pour ne jamais le renvoyer pendant ces 32 ans de "pré-retraite" en Page Blanche. Une entreprise peut parfois se montrer incroyablement humaine (il est vrai qu'il avait déjà acquis un statut légendaire à l'intérieur du magazine).

    mercredi 20 mai 2015

    Soirée jeu de rôle et écriture

    Ce soir à la Bibliothèque Louise Michel à Paris, dans le 20e.

    Add. Très belle soirée, et merci à l'enthousiasme des bibliothécaires et des éditeurs ou auteurs de jeu de rôle présents. Le thème de la soirée, "écriture et jeu de rôle" a été justifié par certains jeux très "Indépendants" (issus des forums no-forgeites de Silentdrift et Les Ateliers Imaginaires). Nous avons pu voir quelques jeux et j'ai pu essayer Prosopopée (avec l'aide de Fabrice Hildwein), joli expérience de narration partagée autour d'exploration métaphysique. Je me rends soudain compte (mais de nombreux commentateurs me l'ont déjà reproché sur ce blog) à quel point mon expérience des jeux indies était restée assez peu approfondie jusqu'ici.

    La Place de Grève


    C'est banal, mais je ne m'étais jamais dit auparavant que l'Iliade n'est pas seulement une histoire de guerre, c'est l'histoire d'une grève.

    Le récit fondateur de notre littérature est une grève face au combat, même si l'enjeu n'est pas "social".

    Dans une société d'honneur par la vaillance martiale, cela ne va pas de soi de passer de la Vengeance à la Grève par bouderie. Norbert Elias y verrait peut-être un début de civilisation dans la rétorsion ou l'intimidation (même s'il y a un élément de vengeance quand Achille demande à Thétis que les Grecs essuient des défaites tant qu'il refusera de se battre).

    C'est une grève qui réussit d'ailleurs, même si c'est de manière ambiguë, Achille récupérant Briséis mais en perdant Patrocle - et il y aura un autre exemple de Grève spectaculaire contre la Guerre dans Lysistrata d'Aristophane, grève d'Aphrodite contre les activités d'Arès.

    La Bhagavad-Gita (dans le Mahabharata) est à l'inverse un récit où l'Absolu vient exiger qu'on endosse sa fonction sociale sans états d'âme et qu'on n'aille pas dans le renoncement.

    mardi 19 mai 2015

    Superclique gratuit


    Supergänget est un jeu de rôle de superhéros suédois de 2007 par Tobias Radesäter (Supercrew dans la version anglaise, Superclique dans la version française traduite par Udo Femi chez La Boite à Heuhh et distribuée gratuitement, en seulement 36 pages).

    Une des originalités de ce jeu narrativisto-humoristique est que la totalité des règles était présentée sous forme de comics, dessinés par l'auteur et qu'une des conventions (comme dans Villains & Vigilantes) est que les joueurs y interprètent des versions alternatives d'eux-mêmes, y compris sur le fait que les personnages sont aussi des joueurs de jeux de rôle (on se demande jusqu'où pourrait aller la mise en abyme).

    Voilà le résumé de toutes ces règles :

    On a 3 capacités. On les tire avec un dé :

    1 Attribut (l'équivalent d'une caractéristique surhumaine)
    2 Superpouvoir
    3 Attaque
    4 Equipement
    5 Contrôle (d'un élément, d'une substance)
    6 Super-Compétence

    Chacune des 3 capacité reçoit soit 1 d6 (capacité la plus faible), soit 2 dés, soit 3 dés (la plus forte).

    Le perso a aussi 3 "techniques", des effets spéciaux, qu'il peut utiliser pour améliorer l'usage de ses capacités. La technique peut soit (1) relancer ses dés ; soit (2) changer un résultat en un 5 ; soit (3) changer un résultat en un Effet 2. Chacun de ses effets ne peut s'employer qu'une fois par aventure.

    Système : on lance Nd6 selon la Capacité (et on peut appliquer une technique). Chaque résultat > 3 est un "Effet" et tout Effet > 0 est un succès. Chaque 6 autorise une relance en plus (où le 6 initial compte toujours comme un Effet bien sûr). Une fois par aventure, un Héros qui a créé une "anecdote" passée de l'équipe a droit à un dé de bonus. Un Héros peut aussi soutenir un Effet d'un autre en utilisant sa Capacité.

    A chaque utilisation de la Capacité à 1 dé, on gagne 1 point de Héros. A chaque utilisation de la Capacité à 3 dés, on perd 1 point de Héros (il faut donc aussi utiliser sa capacité faible pour pouvoir utiliser sa capacité la plus forte).

    Dans un combat, l'attaque est simultanée et l'Effet le plus haut donne le succès et l'initiative. Si on veut attaquer, on n'a droit qu'à une Défense Réflexe (1 dé). Si on renonce à son attaque à ce tour, on a droit alors d'utiliser une de ses Capacités comme Défense totale. On soustrait l'Effet de la Défense de l'Effet de l'Attaque et le résultat est les dégâts.

    Un Héros a 3 points de Vigueur et les dégâts sont soustraits de sa Vigueur, mais les dégâts ne sont que temporaires et on récupère ses points de Vigueur à la fin.

    Exemple de personnage (converti d'un de mes vieux PJ de Superworld) :

    Dark Warp
    Contrôle du Warp dimensionnel 3 dés*
    [* mais centré sur son corps]
    Corps intangible 2 dés
    Vol 1 dé

    Techniques
    Crier "Let's do the Warp Again" (relance)
    Seuls ses yeux brillent dans le Warp (dé à 5)
    Une Singularité apparaît dans le Warp (Effet 2)



    Réforme du collège (4) Para bellum scholarum


    J'étais en grève (mais j'ai pris mes classes gratuitement, pour ne pas perdre les dernières heures de l'année car j'ai toujours du mal à boucler tout le programme pendant le mois de mai).

    Cela dit, par esprit de contradiction, je dois reconnaître que cet article d'Antoine Prost favorable à la réforme est un des plus efficaces (malgré son apparente "brutalité"). On ne peut pas accuser Prost de ne pas bien connaître ce système qu'il étudie depuis longtemps. L'argument "la critique est aisée" paraît facile mais en un sens, je pense que c'est de bonne foi.

    Je continue à penser que les EPI ne sont qu'un gadget discutable, fait avant tout pour retirer quelques heures tout en achevant les dernières ruines des langues anciennes, mais l'objection de Prost est assez bien faite :
    1 les réformes du collège ne passent en fait jamais depuis 35 ans, sauf sur quelques détails de programme et
    2 si vous critiquez cette réforme, proposez donc une contre-réforme (qui n'ait pas un coût excessif).

    J'ai bien une contre-réforme mais elle paraît irréaliste politiquement, je le reconnais : une variante du Projet de Loi Savary de 1983 à la place de notre situation actuelle des lois Falloux et Debré. Elle ne proposait pas de supprimer l'enseignement privé (il doit pouvoir continuer à exister) mais seulement de recréer un système public laïc et unifié (et ce fut pourtant déjà une explosion).

    Si les écoles privées n'étaient pas subventionnées par l'Etat (ce qui en fait des modèles finalement plus proches des charter schools américaines que d'écoles vraiment privées), les écoles publiques auraient gardé plus de mixité sociale et on n'aurait pas laissé dépérir un système qui est devenu aujourd'hui plus inégalitaire socialement qu'aux USA. 20% des élèves français vont dans ce semi-privé subventionné par tous les contribuables, contre 10% des élèves américains, mais ce chiffre de 20% semble rester relativement stable comme ces privés sous contrat ne se développent pas tant que cela, tout en drainant des élèves plus sélectivement peut-être que par le passé.

    Bien sûr, cela ne se fera pas, nul ne voudra jamais rallumer la Guerre Scolaire (la dernière fois, c'était la droite, mais pour accroître la domination du privé au contraire). Mais au moins, cette possibilité aurait des effets et n'entraînerait pas à ma connaissance de surcoût irréaliste (certes, il faudrait alors absorber plus d'élèves dans le public mais en même temps, il y aurait aussi moins de financement de ces structures privées).

    lundi 18 mai 2015

    GoT S0506 "Unbowed, Unbent, Unbroken"


    Globalement, c'est l'épisode le plus décevant de cette 5e saison.

    Le titre est la devise des Martell et fait donc référence à la situation à Dorne des Filles d'Oberyn, mais par extension de plusieurs personnages féminins qui vont devoir apprendre à tenir tête à l'adversité : aussi bien Arya Stark, Sansa Stark-Bolton, les Vipères des Sables avec Ellaria et la Reine Margaery. Le thème récurrent est le mensonge et donc la possibilité de faire face à la vérité, du parjure de Margaery à la mauvaise foi sélective d'Arya (qui se fait frapper plusieurs fois - la violence envers les femmes étant un autre thème récurrent, dès qu'on les soupçonne d'avoir menti, comme Sansa devant Ramsay).

    Il y a 5 intrigues (contre 4 l'autre fois).

    1 Les îles près de Valyria dans la Mer étroite

    Voir la carte de l'Ancienne Valyria

    Jorah Mormont ne semblait pas avoir beaucoup d'affection pour son père Jeor le Vieil Ours jusqu'ici mais la scène où il apprend sa mort est assez réussie.

    L'ellipse du combat doit venir du fait qu'ils se consacraient à échouer dans la représentation du combat à Donre. J'imagine que Jorah ne peut se servir des écailles grises pour faire peur aux Pirates. Ils l'auraient simplement tué.

    Cette intrigue va devenir ennuyeuse, tant que Tyrion n'aura pas pu se rapprocher de Daenerys (ce qui n'arrivera peut-être qu'en 2016). Mais la scène où Tyrion fait remarquer que Daenerys, fille du Tyran fou et émigrée qui ne connaît pas son propre pays, ne risque pas d'être une bonne monarque est une bonne objection à toutes les manipulations de Varys depuis le début.

    2 A Braavos, dans le Temple du Dieu Multiface. 

    Ils vont quand même moins lentement que dans le bouquin mais c'est une histoire qui ne m'intéresse pas vraiment, même si c'est visuellement réussi. Si Arya devient une Sans Visage, on sait bien qu'elle n'y gagnera rien en réalité - mais si son Initiation réussissait, j'imagine qu'en perdant son identité, elle perdrait aussi les raisons qu'elle avait à l'origine de rejoindre les Sans Visage. Martin décevra l'attente prévisible d'une vengeance : les moyens utilisés pour cette fin finiront par être pires que la fin (et je ne crois pas que l'ascension politique de Sansa soit mieux placée).

    3 A Dorne

    Cette histoire très modifiée dans l'épisode est ratée.

    (1) Jaime et Bron arrivent à rentrer dans le Palais royal très facilement sans jamais être interrogés. On n'y croit pas une seconde. C'est vraiment un scène facile ou mal écrite. Ne pouvaient-ils pas inventer des éléments pour justifier un peu cette absence de gardes ?

    (2) Comme par hasard, leur tentative d'enlèvement de Myrcella coïncide avec celle par les Serpents des Sables. Ce combat est peu crédible.

    D'un autre côté, Bron a été touché par une arme d'une des Vipères et on sait ce qu'il en est... Pauvre Bron, les fans vont hurler.

    L'intrigue est très simplifiée. Dans le roman, ils voulaient mettre Myrcella sur le trône de Westeros alors qu'ici elles veulent simplement se venger en effrayant Cersei.

    4 A Port-Réal

    Comme d'habitude, mon histoire favorite, même quand Tyrion n'y est plus, parce que ces intrigues politiques sont mieux faites que les scènes d'action comme l'horrible scène de Dorne.

    Olenna Martell est de retour et elle sauve l'épisode, même si la Reine d'Epines échoue face à l'alcoolisme de Cersei.

    Les Moineaux sont un peu simplifiés (dans le roman, ils réussissent à paraître plus ambigus car on a l'impression qu'ils ne sont pas que des Puritains, ils ont l'air d'être les seuls à se soucier vraiment de ce qui arrive aux gens ordinaires). Mais au moins Margaery n'est pas (encore ?) accusée d'adultère, seulement de parjure.

    Ce malheureux Tommen (qui était torturé par Joffrey enfant) est enfermé dans sa passivité.

    Mais Cersei n'a pas encore compris quelle boite elle a ouverte alors que Frère Lancel devrait le lui rappeler.

    La discussion avec Littlefinger est très réussie. On croit presque que Petyr Baelish a vraiment un Plan compliqué alors qu'il a l'air d'être surtout motivé par une sorte de Chaos "créateur" où il veut semer le plus de désordres possibles. Malgré son air rationnel, Littlefinger est peut-être un être pire encore que le sadisme de Bolton.

    5 A Winterfell

    Cette scène est pénible parce qu'on a l'impression qu'elle ne réussit pas à assez montrer la force supposée de Sansa et qu'on peut craindre qu'elle ne serve qu'à montrer une possible Rédemption de Theon (si ce n'est qu'il y a aura Brienne, avant qu'elle ne meure éventuellement ?). Et je n'arrive pas à vouloir tirer de la joie de la Punition à venir de Ramsay, qui est trop proche d'un Mal Unidimensionnel pour qu'on puisse le juger.

    Add. Philip Sandifer a un essai plus réfléchi sur la progression de Sansa.

    "Gamifier" la création du contexte


    Cette tentative de transformer en un petit jeu l'histoire de son univers (par Jacob Lindsay sur le blog de David Schirduan) a l'avantage de tenir en moins de 200 mots (pour un concours de jeux minimalistes).

    J'aime bien le mécanisme de ce "World Builder Dice Killer" assez contre-intuitif où c'est le joueur qui perd un combat qui obtient le pouvoir "narratif" de décider d'un fait de l'univers. Cela a l'effet étrange que le gagnant de ce mini-jeu aurait imposé une domination de ses cultures (ses "Unités" représentées par des Dés) mais dans un univers qu'il aurait peu "façonné".

    Je me demande si ce ne serait pas mieux de considérer la face sur laquelle tombe le dé comme un puissance un peu stable de l'Unité et d'ajouter alors un dé fixe (par exemple d6) à ce facteur dans les combats, au lieu de retirer le dé-Unité de sa position et de le jeter à chaque fois.

    Il faudrait voir aussi dans quelle mesure on peut concilier cette démarche à base de lancer de Dés (pour représenter la disposition spatiale) et des cartes comme dans le jeu Microscope (où la succession des cartes représentent au contraire la succession temporelle, avec la possibilité ensuite d'insérer des intervalles ou de zoomer sur une période historique même rétroactivement). Cet essai de ce jeu utilise aussi des tarots pour inspiration.

    dimanche 17 mai 2015

    Doom Patrol #9 Doom Patrol vol. 1 n°87

    prologue#80#81#82#83#8485, #86.


    Doom Patrol #87, mai 1964 (8e épisode)
    Voir l'Index par Lou Mongin. Le scénario est toujours par Arnold Drake, les dessins par Bruno Premiani.

    "The Terrible Secret of Negative Man" (17 pages)
    Larry Trainor, alias Negative Man, tombe amoureux d'une française blonde, Gabrielle Soulet, qui n'est autre en réalité que Madame Rouge, l'assassin de la Confrérie du Mal (qui compte un nouveau membre en plus du gorille Monsieur Mallah, le Nain transformiste Giacomo).

    Elle le manipule pour qu'il permette à la Confrérie d'accéder à des armes robotiques miniatures qu'ils agrandissent. Le Cerveau commence à lancer une armée de robots téléguidés et pour les arrêter Negative Man enlève pour la première fois ses bandages devant les autres membres de la Patrouille de la Destinée. On pensait qu'il était seulement défiguré et on découvre la vérité : non seulement son irradiation l'a transformé en un être qui ressemble à une photo en rayon X mais les bandages protègent aussi l'extérieur car il dégage toujours des radiations depuis son accident (cette idée devrait pouvoir se récupérer pour le radiumpunk inventé par Serge Lehman pour la Brigade chimérique, si on veut y mettre aussi Ōgon Bat). Le Chef doit renouveler périodiquement ses bandages pour qu'ils continuent à préserver les autres autour de lui.


    A la fin, Madame Rouge et Giacomo sont arrêtés mais Monsieur Mallah et le Cerveau réussissent à s'enfuir. Madame Rouge reviendra vite, alors qu'à ma connaissance le Nain Giacomo fut complètement oublié, même par Grant Morrison, qui aime tant les personnages bizarres de cette série.

    Dans cet épisode, Rita Farr (Elasti-Girl) montre clairement sa jalousie quand Larry flirte avec l'espionne française, et Cliff Steele (Robotman) tente assez maladroitement d'en profiter pour séduire Rita. C'était un avantage de la Doom Patrol par rapport aux FF, le fait qu'ils ne soient pas au départ une famille comme les Fantastiques signifiait qu'on pouvait avoir un Triangle amoureux sans trop savoir vers qui l'affection de Rita devait aller (même en supposant que Le Chef n'ait qu'un rapport "paternel"). Les lecteurs seront sans doute étonnés dans Doom Patrol #91, seulement 4 épisodes après quand Rita va finalement considérer que sa relation avec les autres membres de l'équipe est simplement "fraternelle" et qu'elle tombe amoureuse d'un nouveau personnage ambigu, Mento.

    Alors que le numéro précédent était complété par un ajout sans rapport, l'histoire principale est complétée par une histoire de Robotman de 8 pages, "Robotman Fights Alone". Il part sur l'île de Sutu, dans le Pacifique, pour arrêter Vince Harding, un assassin en fuite. L'épisode sert surtout à démembrer peu à peu ce pauvre Robotman, qui doit ensuite réussir à vaincre Harding seulement avec son tronc (et l'arrivée du reste de la Patrouille) comme une sorte de Chevalier Noir de Monty Python.

    Le même mois de Mai 1964 sort Uncanny X-Men #5, dans lequel les X-Men luttent dans le Satellite "M" contre Magneto et la Confrérie des Mauvais Mutants. Les coïncidences continuent et la Doom Patrol va sans doute rencontrer sa Brotherhood of Evil pendant ces quelques années encore plus souvent que les X-Men ne rencontrent leur Brotherhood of Evil Mutants.

    Roy Thomas (qui a été un fan de la Doom Patrol) aussi reprendra le même modèle des histoires séparées en flash-back de certains des X-Men mais trois ans après, à partir de Uncanny X-Men #39 (décembre 1967). Et ironiquement, ce modèle continuera quand Arnold Drake arrivera comme nouveau scénariste dans Uncanny X-Men #48 (septembre 1968).

    samedi 16 mai 2015

    Comics DC de superhéros de l'Âge d'Argent Avant FF#1


    Comme les comics Marvel furent nettement plus influents en France que ceux de DC, il y a parfois un risque de prendre trop au pied de la lettre les histoires racontées par Stan Lee sur les origines des comics Marvel, qui inventent rétroactivement une genèse complètement indépendante de DC. Je ne sais pas si Stan Lee lisait vraiment la concurrence (son mépris envers DC ne semble pas feint) mais les autres le faisaient. Les comics de superhéros Marvel ne commencent vraiment qu'avec Fantastic Four #1 de novembre 1961 (si on laisse de côté Timely et Atlas) et à cette date cela fait quelques années que DC avait remodelé l'Âge d'Argent. Un vote des fans de comics de 1962 considérera que le meilleur comic de l'année passée était Flash #123 (qui crée le Multivers) et non Fantastic Four #1 (dont on ne saisira l'importance historique que plus tard).

    Les comics DC de superhéros peuvent se diviser à cette période en à peu près deux groupes :
    (1) la famille Superman (dirigés par Mort Weisinger et souvent écrits par Jerry Siegel) ou la famille Batman,
    (2) les comics édités par Julius Schwartz avec des scénarios de John Broome (Flash, Green Lantern) et Gardner Fox (Justice League of America, Atom, Hawkman).
    Ces deux domaines avaient peu d'intersection, en dehors de la Ligue de Justice (où justement Superman et Batman gardaient une position plus marginale). Il y eut une explosion de créativité dans cette période mais au bout d'un moment, cela finit par se répéter alors que Marvel allait introduire une voix nouvelle qui sortirait du ronron de toutes ces couleurs de Kryptonite... DC va être un archétype mais Spiderman, notamment, va apprendre à rompre avec de nombreuses conventions de DC.

    DC, qui reste en tête des ventes pendant les années 1960, mettra longtemps à réagir (en dehors de quelques exceptions comme Doom Patrol, tentative de concurrencer les FF). Un bon exemple de cette attitude "conservatrice" (pas au sens politique) est l'incroyable stabilité de la Ligue de Justice qui, de 1960 aux années 1980 ne changera que très peu sa composition (juste une poignée de membres en plus) alors que l'équivalent Marvel, les Avengers, fera des révolutions périodiques depuis Avengers #16 pour donner une impression de ne jamais arrêter le statu quo.

    Voici une chronologie des principaux titres avant Novembre 1961. J'ai exclu les titres de Batman et de Wonder Woman, qui avaient pu continuer depuis l'Âge d'Or, et qui me semblent avoir été moins novateurs à cette période.



  • 1956
    octobre 1956
    Flash apparaît et dit dès sa première apparition (par Robert Kanigher) qu'il s'inspire du Flash des comics de l'Âge d'or (Showcase #4), qu'il lisait mais qui n'existaient plus depuis environ 7 ans (le prétendu "Âge sombre" fut donc relativement court pour les superhéros). Cette mise en abyme fait que le premier Flash est explicitement fictif aux yeux du second. Il y a eu bien des nerds dans les comics avant ce Barry Allen, mais il pourrait être le premier héros geek par son côté fan de comics. Je ne connais d'ailleurs pas d'équivalent chez Marvel d'un personnage fan (à part Rick Jones chez Roy Thomas). Dans la seconde histoire, Flash affronte un criminel venu du futur, du 50e siècle et le voyage dans le temps va devenir un thème récurrent.



    décembre 1956
    Showcase #5 revient à une tentative qui ressemble plus à du "policier" réaliste.

  • 1957
    février 1957
    Les Challengers of the Unknown, dessinés par Jack Kirby (Showcase #6). Leur premier ennemi, l'alchimiste Morellian ressemble beaucoup à l'alchimiste Diablo (FF #30, sept. 64) - si ce n'est que Diablo a déjà trouvé l'immortalité alors que Morellian la cherche.

    avril 1957
    Les Challengers of the Unknown affrontent le Robot Géant Ultivac (Showcase #7).
    juin 1957
    Flash affronte son premier vrai supervillain, et peut-être donc le premier supervillain récurrent de l'Âge d'Argent, créé par John Broome, Captain Cold (Showcase #8). Un détail que j'aime bien est que Captain Cold hésite entre plusieurs pseudos ("Mr. Arctic! The Cold Wave! Sub-Zero! Human Icicle!") sur le thème du froid avant de s'arrêter à l'allittération. Les adversaires de Flash ont parfois ces scènes anecdotiques de réalisme où ils se demandent comment fabriquer leur costume... Je ne pense pas que ses lunettes aient influencé celles de l'Homme-Taupe dans FF #1 mais sait-on jamais...

    décembre 1957
    Les Challengers of the Unknown battent une invasion extraterrestre de créatures nommées les Tyrans (Showcase #11).

  • 1958
    février 1958
    Les Challengers of the Unknown affrontent un voleur humain qui a pu se diviser et acquérir des pouvoirs différents grâce à des fioles alchimiques (Showcase #12)
    avril 1958
    Superboy est recruté par la Légion des Superhéros du 30e siècle (Adventure Comics #247). Elle ne compte encore à cette époque que les trois membres fondateurs qui sont décrits, Cosmic Boy, Saturn Girl et Lightning Lad. Il faudrait vérifier mais la Légion doit être la première équipe de superhéros créée d'un seul coup comme un groupe au lieu de seulement réunir des héros préexistants.
    Flash affronte Mr Element (Showcase #13).
    mai 1958
    Les Challengers of the Unknown partent sur un autre monde et sont capturés par un enfant géant (Challengers of the Unknown #1, le premier officiellement écrit par Jack Kirby lui-même).
    juin 1958
    Superman présente pour la première fois "La Forteresse de Solitude" (Action Comics #241).
    Flash fait un voyage extradimensionnel. Mr Element trouve la Pierre philosophale et devient Dr Alchemy (Showcase #14).
    juillet 1958
    Superman rencontre Brainiac, qui va devenir l'un de ses ennemis principaux, et trouve la cité de Kandor (Action Comics #242).
    Les Challengers affrontent plusieurs monstres (CotU #2)
    septembre 1958
    Rocky, un des Challengers (qui ressemble beaucoup à Ben Grimm), effectue un vol spatial, est bombardé par des rayons cosmiques et reçoit des pouvoirs de projection de flammes et d'invisibilité. L'épisode est écrit et dessiné par Jack Kirby qui fera 3 ans plus tard Fantastic Four #1 (CotU #3). Quand on lit cela, l'hypothèse que le rôle de Stan Lee ait été assez mineur (en dehors des dialogues) sur les FF est assez raisonnable, même si on a bien le synopsis d'époque (où Ben Grimm, dans la première version, devait être un amoureux éconduit de Jane Storm, et où celle-ci devait être incapable de redevenir visible).
    octobre 1958
    1ère apparition de Bizarro, le clone raté de Superman (Superboy #68). Il aura sa propre série humoristique dans Adventure Comics par la suite.
    novembre 1958
    Les Challengers affrontent le Wizard of Time, qui a à sa disposition un Cube Temporel (CotU #4). Il fait penser au vieil ennemi de la JSA, Per Degaton, mais son apparence et son pouvoir ressemblent énormément à Immortus (Avengers #10, nov. 1964).
    décembre 1958
    Adam Strange va pour la première fois sur Rann (Alpha Centauri). Showcase #17

  • 1959
    janvier 1959
    Les Challengers affrontent un vilain qui cherche quatre gemmes liés à chacun des quatre éléments (celle de feu permet de projeter des flammes, etc.). Là encore, Stan Lee prétendra plus tard avoir eu l'idée de créer les Quatre Fantastiques autour des quatre élements classiques. CotU #5
    mars 1959
    Flash commence dans son propre titre avec Flash #105 (ils reprennent la numérotation interrompue en 1949). Il bat le Mirror Master, un ennemi aux pouvoirs souvent très flous et arbitraires (défaut assez courant des personnages chez DC et dans Flash en particulier).
    Les Challengers explorent une vallée qui contient des mages (CotU #6).
    mai 1959
    Supergirl arrive sur Terre (Action Comics #252).
    Flash affronte le Pied Piper et Gorilla Grodd, il découvre la cité secrète des Gorilles (Flash #106).
    Les Challengers affrontent des créatures extraterrestres lâchés par des Plutoniens (CotU #7).
    juin 1959
    Jimmy Olsen regagne de manière plus durable des pouvoirs d'élasticité après avoir bu un sérum dans Jimmy Olsen #37 (il avait déjà eu une mutation proche mais temporaire dans Jimmy Olsen #31).
    juillet 1959
    Les Challengers affrontent Kra, un robot qui a mené ses robots à la rebellion contre leurs créateurs. C'est le dernier épisode des Challengers écrit et dessiné par Jack Kirby, qui va partir à la concurrence chez Marvel (CotU #8).
    Grodd le Gorille revient déjà. Flash sauve un androïde venu d'une autre planète et qui sert une espèce, les Dirigeants, qui ressemblent un peu aux futurs Gardiens de l'Univers (l'androïde à supervitesse est-il un Manhunter ?). John Broome ne réutilisera pas directement ce concept des "Dirigeants", mais il l'avait déjà utilisé naguère avec Captain Comet. (Flash #107).
    août 1959
    Adam Strange commence sa série dans Mystery in Space #53, scénarios de Gardner Fox et John Broome.
    septembre 1959
    Flash affronte une 3e fois Grodd le Gorille et des extraterrestres, les Mohruviens, qui tentent de lui voler sa célérité Supraluminique - c'est donc la première confirmation que Flash peut aller plus vite que la lumière, même s'il pouvait sembler s'en approcher avant (Flash #108).
    octobre 1959
    Green Lantern a sa première aventure dans Showcase #22, avec ses origines et une histoire d'espionnage. L'existence du Corps est implicite. Il n'entend pas tout de suite parler des Gardiens de l'Univers.
    novembre 1959 Flash affronte le Mirror Master une 2e fois (Flash #109).
    décembre 1959 La Légion des Superhéros (vue 20 numéros avant) revient une 2e fois au XXe siècle face à Superboy dans Adventure Comics #267.
    Les Gardiens de l'Univers envoient Green Lantern dans sa première mission hors de la Terre (Showcase #23).

  • 1960
    janvier 1960
    Flash affronte le Weather Wizard et le neveu de son amie, Wally West acquiert les mêmes pouvoirs que lui et devient Kid Flash, premier sidekick de l'Âge d'Argent (Robin existant depuis l'Âge d'or). (Flash #110).
    février 1960
    Green Lantern affronte une créature irradiée par des Rayons cosmiques (Showcase #24).
    Un mois après Flash, Aquaman va obtenir aussi son propre sidekick, Aqualad (Adventure Comics #269)
    mars 1960
    C'est la première aventure de la Justice League of America, avec cinq membres, Flash, Green Lantern (qui n'a pas encore son titre régulier), Wonder Woman, Aquaman et Jonn Jonnz Martian Manhunter (Brave & the Bold #28). Ils battent une invasion de Starro l'étoile de mer intelligente, grâce à Snapper Carr, un jeune homme normal qui va devenir la mascotte des premiers épisodes (et qui sera directement imité chez Marvel avec la figure de Rick Jones dans Hulk puis Avengers). Le village de Nouvelle Angleterre, Happy Harbor, où vit Snapper, sera la première base d'opération de la JLA.
    Flash affronte des nuages intelligents formés par un volcan. Ok, même John Broome fait parfois des histoires idiotes (Flash #111)
    mai 1960
    La JLA (avec cette fois Batman et Superman) affronte Xotar, un savant fou du 120e siècle (Brave & the Bold #29).
    Flash rencontre un nouvel allié, Elongated Man (Flash #112). Son costume comme ses origines semblent très inspirées d'Elastic Lad alias Jimmy Olsen en juin 1959.
    juillet 1960
    La JLA affronte le Professeur Ivo qui a créé un androïde, Amazo, qui a absorbé tous les superpouvoirs des membres de la Ligue (Brave & the Bold #30)
    Flash affronte le Trickster et ensuite lutte contre un extraterrestre, Poseidon, qui lui apprend que tous les Olympiens de la mythologie étaient en fait des créatures extraterrestres à la science avancée qui ont formé les êtres humains par manipulation génétique et qui ont perdu le contact avec cette ancienne colonie. Oui, toute la mythologie VonDänikenienne des Eternals de Jack Kirby est déjà là, mais cette histoire sera vite oubliée car elle contredit les apparitions des Olympiens dans Wonder Woman (Flash #113).
    août 1960
    La Légion des Superhéros réapparaît pour recruter aussi Supergirl (Action Comics #267). C'est la première fois qu'apparaissent Chameleon Boy, Colossal Boy et Invisible Kid.
    Flash affronte une 2e fois Captain Cold (Flash #114)
    Green Lantern rencontre les Gardiens de l'Univers et affronte un criminel nommé le Puppet-Master (Green Lantern #1).
    septembre 1960
    Grodd revient (une 4e fois) et tente de transformer Flash pour le priver de sa rapidité (Flash #114)
    June, l'amie des Challengers of the Unknown, devient temporairement une Géante et lutte contre des monstres. Une autre inspiration à ajouter à Elasti-Girl de la Doom Patrol (CotU #15)
    octobre 1960
    Green Lantern va dans l'Univers d'Anti-Matière et y trouve la version inversée des Gardiens d'Oa, les Armuriers de Qward (Green Lantern #2).
    novembre 1960
    La Ligue de Justice lutte contre Despero, tyran extraterrestre (Justice League of America #1).
    Flash a à nouveau une aventure dans une autre dimension (Flash #116).
    décembre 1960
    Flash affronte Captain Boomerang et rencontre les Trois Idiots (trois personnages secondaires, comiques récurrents du premier Flash de l'Âge d'Or qu'il rencontre donc 6 numéros avant de tomber sur la dimension de Terre 2, Flash #117).
    Les Qwardiens volent la Batterie de la Lanterne de Green Lantern qui doit aller la récupérer. (Green Lantern #3)

  • 1961
    janvier 1961
    La Ligue de Justice intervient, avec l'aide de Merlin, dans la Dimension de la Magie pour restaurer les lois de la nature (JLA #2). Ils en tirent la Boule de cristal qui leur permettra de communiquer avec Terre 2 l'année suivante.
    La Légion des Superhéros revient une 4e fois, brièvement dans une histoire (Superboy #86).
    février 1961
    Aquaman a ses nouvelles origines de l'Âge d'Argent, qui le rapproche plus de Namor (Showcase #30).
    Les Qwardiens inventent un robot pour lutter contre Green Lantern. Le robot devient conscient et se sacrifie pour sauver Green Lantern (GL #4).
    mars 1961
    La Ligue de Justice lutte à la fois contre Kanjar Ro et d'autres tyrans de l'espace (JLA #3).
    Elongated Man se marie avec Sue Dibny (1er mariage de superhéros), et Flash doit affronter une 3e fois Mirror Master (Flash #119).
    Hawkman et Hawkgirl, deux policiers de la planète Thanagar, arrivent sur Terre à la poursuite du criminel Byth qui peut se polymorpher. Le commissaire de police de Midway City les aide à se créer une identité secrète d'archéologues en les nommant à la tête d'un Musée (Brave & the Bold #34).
    La Légion des Superhéros revient avec Star Boy (Adventure Comics #282).
    avril 1961
    Hawkman affronte le Matter Master (Brave & the Bold #35).
    Green Lantern affronte Hector Hammond, qui utilise un météore pour avancer l'évolution du Cerveau (GL #5).
    mai 1961
    5e apparition de la Légion des Superhéros. Supergirl rencontre d'un coup 5 membres nouveaux, Bouncing Boy, Brainiac 5, Phantom Girl, Shrinking Violet, Sun Boy (Action Comics #276). En comptant les deux Kryptoniens, la Légion a donc maintenant 13 membres, ce qui commence à en faire une vraie Légion.
    Flash consent enfin (avant une mission dans le temps) à révéler son identité à Kid Flash (Flash #120).
    La Ligue (sous la présidence de Wonder Woman) recrute par vote son premier nouveau membre, Green Arrow, après propositions de Hawkman ou Adam Strange (JLA #4).
    juin 1961
    Flash lutte à nouveau contre le Trickster (Flash #121).
    Green Lantern va aider Tomar-re, Green Lantern de Xudar, et un monde où tout le monde dort en s'étant uploadé dans des simulacres virtuels (GL #6).
    Superboy rencontre Mon-El de la planète Daxam. Pour le sauver, il l'envoie dans la Zone Fantôme (Superboy #89). Ce n'est que plus tard qu'il va rejoindre la Légion des superhéros.
    juillet 1961
    Hawkman affronte Shadow Thief (The Brave & the Bold #36).
    La Ligue de Justice déjoue un plan complexe du Doctor Destiny (JLA #5). Mais je pense que le Dr Doom, le plus célèbre adversaire des FF, tient plus du héros Dr Fate en un sens que de ce Dr Destiny.
    août 1961
    Dev-Em, un voyou kryptonien, retrouve Superboy sur Terre mais s'enfuit ensuite au XXXe siècle (Adventure Comics #287).
    Lex Luthor contacte la Légion des Supervilains au XXXe siècle (Cosmic King, Lightning Lord et Saturn Queen) qui viennent affronter Superman (Superman #147).
    Flash affronte The Top et son ami le couturier français Antoine Prévin tente de modifier le look d'Iris (Flash #122).
    Green Lantern affronte pour la première fois celui qui va devenir son adversaire principal, Sinestro, l'ex-Green Lantern déchu de la planète Korugar qui s'est allié aux Armuriers de Qward (GL #7).
    septembre 1961
    Brainiac rétrécit Superman et ses amis, qui sont sauvés par Congo Bill. Supergirl doit lutter contre une criminelle kryptonienne sortie de Kandor et alliée à Lex Luthor (Action Comics #280).
    Flash traverse pour la première fois la barrière dimensionnelle vers Terre-2 et rencontre le Flash originel des comics de l'Âge d'Or. Le Flash de Terre-1 mentionne qu'un certain Gardner Fox (le scénariste réel de cet épisode) vit sur Terre-1 et qu'il va lui raconter l'histoire qui se déroule sur Terre-2. C'est la naissance du Multivers DC. Les deux Flash affrontent ensemble trois supervilains de l'Âge d'Or, Wizard, Thinker et Fiddler (Flash #122). Chez Marvel, il y aura le Wizard qui attaque la Torche Humaine un an après, en 1962 (avant de fonder les Trois Terrifiques) et le Mad Thinker qui attaque les FF en 1963.
    La Ligue de Justice affronte Amos Fortune, qui manipule les probabilités (JLA #6).
    octobre 1961
    Superboy affronte Jax-Ur, un savant fou kryptonien qui s'est délivré de la Zone fantôme (Adventure Comics #289).
    Green Lantern a sa première mission au LVIIIe siècle où il protège le système solaire. Cela deviendra récurrent mais cette histoire de John Broome contredit plutôt la continuité avec la Légion des Superhéros comme les Terriens y ont l'air globalement moins avancés qu'au XXXe siècle (GL #8).
    Atom a sa première aventure et aide un extraterrestre miniature et qui se téléporte à échapper à son maître humain (Showcase #34). Chez Marvel, Ant-Man n'apparaît que dans Tales to Astonish n°27 (janvier 1962) dans une histoire d'horreur et ne devient un superhéros qu'en septembre 1962.

    novembre 1961
    Quelqu'un qui se fait passer pour Sun Boy de la Légion des Superhéros vient au XXe siècle pour manipuler Superboy (Adventure Comics #290).
    Flash bat Captain Boomerang (Flash #124).
    Les Angellaxiens peuvent changer d'apparence grâce à leurs techniques (un "duplicateur") et tentent d'infiltrer la Ligue de Justice pour préparer une invasion de la Terre. Déguisés en Green Lantern et Flash, ils font croire à un nouveau plan de Xotar du CXXe siècle (JLA #8). Certains aspects physiques de ces Angellaxiens font penser aux Skrulls (mais la polymorphie des Skrulls est leur pouvoir "natif", plutôt comme Chameleon Boy de la Légion, alors que les Angellaxiens ont une machine).
    Atom mène sa seconde enquête, pour protéger un héritier menacé (Showcase #35).
    décembre 1961
    Superman doit affronter deux Durliens (des Caméléons polymorphes comme Chameleon Boys) venus du XXXe siècle et qui se font passer pour Kennedy et Khroutchev (Action Comics #283).
    Flash et Kid Flash ont une aventure à différentes époques pour sauver la Terre du 23e siècle contre les Dokris qui attaquent aussi la Préhistoire (Flash #125). C'est le début du Tapis-roulant cosmique, une machine que Flash utilisera souvent pour voyager à travers les époques ou les dimensions.
    Atom a une aventure d'espionnage. J'ai l'impression que Gardner Fox soignait plus le "réalisme" des histoires d'Atom que des autres personnages, du moins au début. (Showcase #36).


  • L'année 1961 se termine donc avec les bases de l'univers DC notamment la Ligue de Justice, bien établie (8 numéros, Atom rejoindra bientôt l'équipe en septembre 1962 et ensuite Hawkman), le Corps des Lanternes vertes et le Multivers de Terre-1 et Terre-2 (ce qui ne se développera que deux ans après, dans JLA #21, août 1963). Flash est à cette époque le personnage avec la plus grande série d'ennemis (Captain Cold, Mr Element/Dr Alchemy, Mirror Master, Gorilla Grodd, Weather Wizard, Trickster, Top, Captain Boomerang) alors que Green Lantern n'a guère que les Armuriers de Qward, Sinestro et Hector Hammond. Mais désormais, l'écriture de l'Âge d'argent va dépendre aussi de Marvel.