dimanche 25 avril 2010

Comics de printemps 2010



Ce sont enfin les vacances, ce qui signifie à nouveau 120 copies à corriger. C'est donc le parfait moment pour procrastiner en survolant les derniers achats de comics US.

Le défi serait de réussir à écrire ces brève recensions sans revenir encore une fois sur la temporalité en boucle figée des comics. Il faudrait éviter tout ce ton geignard et réactionnaire qui fantasme un passé glorieux des comics qui n'a en fait jamais existé.

Autant détruire le suspense tout de suite : c'était de la prétérition, je ne vais même pas tenter d'échapper à cette vieille rengaine.


  • Multivers DC


    • Adventure Comics #513
      Normalement, le vrai intérêt de cette série devrait être la Légion des Superhéros mais à présent le titre est complètement absorbé par un cross-over entre les comics de Superman et Superboy intitulée "New Krypton". Je n'ai rien suivi de tout cela, et je n'ai donc strictement rien compris. Cela ne me donne pas vraiment envie de combler mes lacunes. En gros, les survivants de Kandor ont dû retrouver leur taille normale et arrivent sur Terre. Toute la famille Superman (ainsi qu'une partie de la Légion) doit lutter contre Brainiac I et des criminels Kryptoniens de la Zone Fantôme. Le père de Lois Lane est le pire beau-père du monde, un abruti fascisant qui veut tuer des Kryptoniens. Ces Kryptoniens ressemblent à nouveau un peu à la version dystopique de John Byrne (avec des castes génétiques rigides) et plus à la version plus Silver Age qu'on avait vu récemment dans Superman: Birthright de Mark Waid.

      On remarquera les oscillations contradictoires habituelles de DC : ils insistent pendant des années sur le dogme sacro-saint que Superman doit toujours rester le seul survivant de Krypton et ils acceptent soudain des centaines de milliers de Kryptoniens supplémentaires. Jamais de demi-mesures dans l'incohérence. DC est la narration à la Pénélope : ils défont chaque jour ce qu'ils ont établi la veille.

    • Blackest Night #8/8
      La conclusion du cross-over à travers l'univers DC. Certaines scènes sont horriblement mauvaises, comme celle où Hal Jordan enrôle tous ses amis dans le Corps des Lanternes Blanches. On croirait presque une parodie infantile du Genre avec le Gentil en Blanc et le Méchant en Noir.
      Nekron est donc vaincu et l'Anti-Monitor ressuscité pour être envoyé vers un cross-over futur.

      L'histoire se termine avec 12 résurrections qui paraissent complètement arbitraires : Aquaman (tué pour la énième fois dans Aquaman: Sword of Atlantis #50, 2007), Captain Boomerang (tué par le père de Robin III dans Identity Crisis #5, 2004), Deadman (mort depuis sa première apparition dans Strange Adventures #205, 1967), Firestorm (Ronnie Raymond avait été tué dans Identity Crisis #5, comme Captain Boomerang), Hawk (tué par Atom-Smasher dans JSA #15, 2000), Hawkman & Hawkgirl (qui venaient d'être assassinés par des zombies dans Blackest Night #1, 2009), Jade (tuée pendant Rann-Thanagar War Infinite Crisis Special, 2006), Martian Manhunter (tué dans Final Crisis #1, 2006), Maxwell Lord (tué dans Wonder Woman vol. 2, #219, 2006), Osiris (assassiné par Sobek dans 52 #43, 2007) et Professor Zoom (tué par Barry Allen une première fois dans Flash (vol.1) #324, 1983).

      Comme on le remarque, la majorité de ces personnages ont eu à peine le temps d'exhaler leur dernier souffle depuis les derniers cross-overs de 2006 à 2009. On ne laisse même plus le temps à leur tombe de fleurir un peu (surtout que Geoff Johns vient d'envoyer le signe que plus personne n'aurait droit droit à une mort digne avec le retour de Barry "Tout le Monde Reviendra Sauf Moi" Allen). Même une relative obscurité (Captain... Boomerang ???) n'est plus un critère suffisant pour être épargné de la Grande Porte Tournante de l'Hadès.

      Comme je l'avais dit lors des dernières reviews, cela occasionne une sorte d'ironie involontaire dès que quelqu'un porte le deuil dans l'Univers DC : on se dit que les habitants de cet univers ne savent pas faire d'inductions s'ils regrettent un décès qui ne va durer que quelques épisodes.

      Oh, ça y est, mes plaintes deviennent aussi récurrentes que ces vies clignotantes.
    • Brightest Day #0
      La suite immédiate de Blackest Night tente de trouver une justification à ces 12 résurrections arbitraires. C'est ce type de scénario qui insiste sur une incohérence en semblant croire que cette lucidité va finir par l'atténuer. Cette histoire est un symptôme d'un passage à vide dans les récits de DC Comics.

      Non, soyons positif. Deadman vivant, c'est un oxymore qui dénonce bien sa propre absurdité. Peut-être pas assez pour justifier qu'il soit le narrateur.
    • Flash (vol. 3) #1
      Geoff Johns essaye à nouveau la même formule qui a fonctionné avec Green Lantern : relancer une série vieillissante en revenant vers la version de l'Âge d'Argent des années 60. Hormis le dessin légèrement mangaoïde de Francis Manapul, il y a pour l'instant peu de choses qui distingueraient vraiment ce numéro d'une histoire classique de Cary Bates et Carmine Infantino dans les années 60, avec la relation avec son épouse Iris et les Rogues de Central City. La recréation de Green Lantern avait beaucoup plagié Top Gun, cette fois, Johns peut parasiter une source plus à la mode, CSI comme Barry Allen travaille pour la Police scientifique. Tant que Barry Allen ne devient pas un tueur en série comme Dexter...
    • Great Ten #6/10
      Cette mini-série sur les superhéros chinois est plutôt une bonne surprise. L'histoire de Tony Bedard (où les pseudo-Dieux extraterrestres se retrouvent liés à la pègre taiwanaise) a des faiblesses, les dessins de McDaniel sont supehyperrmoches, mais les personnages (créés par Grant Morrison) donnent envie d'en savoir plus sur eux (la série n'étant en réalité qu'une longue publicité pour les présenter).
      Ici, Ghost Fox Killer est une imitation chinoise du Spectre ou de personnages des Pulps mais elle lie les fantômes des gangsters qu'elle exécute pour protéger une Cité de jade extra-dimensionnelle. Cela fait beaucoup d'idées (même si on sait qu'on ne reverra quasiment plus jamais ces personnages).
    • Wonder Woman (vol.3) #42
      Green Lantern doit faire vendre en ce moment, à en croire la couverture légèrement trompeuse (les Lanternes ne font que passer).

      Wonder Woman affronte une invasion d'amazones extra-terrestres génocidaires qui ont absorbé la technologie Oanne (et qui semblent moins intéressantes que les Amazones vues récemment dans Hercules).

      Cela fait maintenant 28 numéros écrits par Gail Simone et je ne me souviens pas d'une histoire digne d'être relue. Cela donne assez de recul pour émettre l'hypothèse que la scénariste ne laissera pas beaucoup de traces dans la mythologie WW. J. Michael Straczynski arrive pour reprendre le titre et il a déjà annoncé qu'il allait "revenir aux fondamentaux" (ce qui laisse craindre simplement qu'il va à nouveau comme chaque scénariste effacer tout le travail précédent). La série va reprendre la numérotation originale en Mai avec le #600 (en même temps que Superman #700 et Batman #700).


  • Editeurs dits "indépendants"

    • Project Superpowers, Chapter II
      Le chapitre I de la série d'Alex Ross & Jim Krueger avait réuni des douzaines de personnages des années 40 tombés dans le domaine public. [Contrairement à ce que je pensais, cela n'arrivera probablement jamais aux héros qui continuent d'être publiés (cf. cette explication).] La première partie avait donné une origine commune métaphorique aux héros : la Boîte de Pandore ouverte par Hitler avait laissé l'Espérance en même temps que les calamités entrer dans le monde et tous ces héros en devenaient des Avatars. Ils revenaient 60 ans après dans un monde devenu despotique en leur absence. Le second chapitre a un peu surmonté ce manichéisme en ajoutant un nouvel ennemi, Captain Future, alias le Dieu Zeus, bien décidé à reprendre le "Feu Céleste" prométhéen qui a alimenté leurs pouvoirs. Cela contraint les héros à pactiser avec leurs ennemis contre l'Olympien. En revanche, la vision de Zeus en obsédé sexuel primaire me paraît un peu simplificatrice. Zeus a certes une libido hors du commun mais peut-être pas quand même au point que cela puisse lui faire perdre sa concentration lorsqu'il est en danger.
    • Supergod #3
      Ecrit par le très surévalué Warren Ellis. L'Humanité a créé des Dieux synthétiques, qui font des sermons plagiés de Richard Dawkins sur l'origine cognitive du divin, et les Dieux se mettent à massacrer toute l'Humanité. Le discours pseudo-anthopologique n'est donc qu'un prétexte de plus pour une violence gratuite de Gore SF. On a aussi droit à quelques passages qui se veulent profonds sur l'évolution de la politique russe mais qui ne s'élèvent pas au-dessus des clichés habituels tout en prétendant être subversifs.

      Le simple fait de savoir qu'aucune loi au monde ne me contraint à lire du Warren Ellis est une sorte de cadeau merveilleux de cette vie. S'infliger du Ellis c'est un peu comme être à une de ces soirées cauchemardesques où un jeune chébran insupportable vous explique à quel point il adoooore Gilles Deleuze en l'ayant seulement feuilleté. Ca justifie aussitôt la ciguë, non ?
    • Savage Dragon #159
      La grande réussite de cette série est d'être arrivé à un point extrêmement rare dans les comics de superhéros : on ne devine pas vraiment la suite. Le Dragon était un héros immortel grâce à ses pouvoirs de régénération dignes de Wolverine. On avait eu droit de multiples fois à son décès avorté. Mais à présent, il a trop bien régénéré. Il a retrouvé la mémoire et revenu à ses origines secrètes (dans Savage Dragon #0) : le Dragon était un tyran extraterrestre cruel avant de devenir amnésique et de refaire sa vie sur Terre comme un policier humaniste (son cerveau étant de toute évidence plastique et un argument pour le primat de l'acquis dans la conscience morale). On a donc le cas rare d'un héros qui ne tombe pas dans le Côté Obscur : il découvre qu'il était un supervilain depuis le début.
    • The Wheel of Time #1
      Il y a de bonnes manières d'adapter un roman en bd. Et il y a cela, verbeux, inutile, ennuyeux, un bon exemple de tout ce qu'il ne faut pas faire. Le premier volume de la série est de toute manière l'un des plus mauvais de la myriadologie de Robert Jordan (cela s'améliore dans les volumes 2-4 avant de devenir illisible dans les volumes 5-1345678). Je conseille donc d'attendre à la rigueur qu'ils adaptent les volumes suivants s'ils y arrivent.

      Les diverses filles se ressemblent déjà un peu et il y en a beaucoup dans la série. Cela deviendra vraiment difficile à interpréter quand elles seront toutes habillées en novices Aes Sedai.


  • Marvel Comics

    • Mighty Avengers #35
      Maintenant que les séries spatiales d'Abnett & Lanning (comme Guardians of the Galaxy) s'arrêtent, il reste encore le scénaristes Dan Slott chez Marvel. C'est toujours très inventif mais difficile à suivre. "Difficile" est un euphémisme pour "je n'ai aucune idée du nombre d'épisodes que j'ai dû rater". Henry Pym flirte toujours avec son androïde Jocasta, imitation de sa femme défunte Janet, et Ultron revient avec tout un essaim de Jocastas à ses ordres. Oui, on a déjà eu droit cent fois à ce genre d'histoires oedipiennes mais Slott lui donne quand même un ton nouveau.
  • samedi 24 avril 2010

    Carte électorale britannique



    Cette carte électorale a l'avantage d'avoir des pixels égaux pour chaque circonscription du Royaume-Uni, ce qui évalue mieux le rapport de force. Les circonscriptions travaillistes sont souvent des zones urbaines qui ont l'air plus petites sur la carte et à l'inverse certaines circonscriptions lib-dem dans le Pays de Galles ou du Parti national écossais sont disproportionnées. Chaque carré est cliquable sur le site pour obtenir des précisions sur la circonscription.


    La projection en question donne à peu près le même vote national au Parti travailliste et au Parti libéral démocrate mais 2,5 fois plus de sièges. Le vote lib-dem (en Jaune) a l'air assez concentré dans le Sud-Ouest, mais le nouveau leader Nick Clegg est élu de Sheffield, dans le Yorkshire (dans une région plutôt Conservatrice).

    Cette autre carte sur le Daily Telegraph calcule le "Swing" moyen au niveau national, mais on ne peut pas faire varier tous les partis en même temps (on laisse donc au moins un parti au score de 2005).

    La Carte de la BBC est mieux faite si on veut jouer.

    Toutes les dernières projections donnent un Parlement sans majorité absolue (sachant que les Lib-Dems disent qu'ils refuseront une Coalition avec les Travaillistes ou les Tories s'il n'y a pas d'engagement à leur accorder une forme de scrutin proportionnel). Les Lib-Dems, qui n'ont que 60 sièges, en espèrent maintenant entre 80 et 115. Les Travaillistes sont le plus souvent premiers en nombre de sièges tout en étant troisièmes en nombre de voix.

    Ravaillacs & Ravachols



    Bien que je sois un fanatique d'Alan Moore, j'ai toujours eu du mal avec le message de V for Vendetta, bd qui prétendait simplifier toute la politique à l'opposition entre les pôles de "l'anarchisme" et du "fascisme", sans voir la fascination en miroir de "l'ultra-conservatisme" pour la violence "terroriste".

    Et cette récupération du Complot de Guy Fawkes par le Parti républicain américain montre bien l'ambiguïté des mouvements prétendument "libertariens" utilisés par des factions réactionnaires de l'oligarchie gouvernementale et du pouvoir financier. Guy Fawkes rejoint ici tout l'imaginaire de la Guerre d'Indépendance dans les dupes des Tea Parties.

    Les Britanniques voyaient dans la comptine sur Guy Fawkes (Remember, remember, the fifth of November, //The gunpowder treason and plot) avant tout un rappel de leur anti-papisme comme mythe unificateur de la nation anglicane, Alan Moore voulait le transformer en métaphore plus large contre le Pouvoir. Les Républicains inversent le mythe britannique mais parasitent la reprise anti-parlementaire : ils se voient en Catholiques opprimés par le Tyran centralisateur et Obama en Roi Jacques Ier. Et cela les autorise à se réclamer d'un acte de terrorisme contre le Parlement (même si le Roi Jacques, théoricien de la Monarchie de droit divin, était déjà un adversaire du Parlement).

    On s'attend déjà à ce qu'ils décrivent bientôt Obama en Domitien persécuteur (Bush était souvent comparé à Néron quand il jouait de la guitare pendant Katrina).

    jeudi 22 avril 2010

    Doctor Who, Saison XXXI



    Dans mes tentatives vaines de remédier au hasard de la naissance qui s'obstine à faire de moi quelqu'un de désespérément non-britannique, je regarde Doctor Who.

    Ce n'est pas aussi difficile que d'aimer la sauce Marmite ou de feindre de l'intérêt pour le cricket mais il faut reconnaître que Doctor Who est vraiment un bon shibboleth de la britannicité. Une partie des Anglais en sont des fanatiques depuis maintenant 47 ans (1963) et 31 "saisons", et le reste du monde contemple cela avec une indifférence perplexe. Je crois qu'il y a quelques Geeks français qui s'y sont mis avec dévotion mais je ne peux qu'y voir qu'une anglophilie débordante ou pathologique.

    Le thème de départ de Doctor Who était censé être une série didactique pour enseigner à la fois l'histoire et les sciences, mais la série sur les voyages dans le Temps en gardé un certain ennui en abandonnant toute prétention à la réalité, et s'enfermant (un peu comme les comics) dans ses propres références et la mythologie accumulée par ses centaines d'épisodes télé plus des milliers de romans, BD et versions audio). Et c'est cela qui est si britannique : cette impression que le Temps n'existe pas et que tout est figé dans une illusion théâtrale de mouvement dans un stase artificielle.

    Le personnage principal est Le Docteur, un extra-terrestre complètement humanoïde qui appartient à la race mystérieuse des Seigneurs du Temps de Gallifrey. Les Seigneurs du Temps ont naguère détruit une étoile avec un Trou noir pour conquérir la maîtrise du temps mais leur espèce a disparu (si j'ai bien compris, en partie parce que le Docteur ne voulait pas laisser ces Eléates effacer le Temps tout entier). Le Docteur, dernier survivant de Gallifrey, n'a aucun pouvoir particulier, en dehors de l'Immortalité et une capricieuse machine à voyager dans le temps (le TARDIS, bloqué sous forme d'une cabine de police bleue des années 50).

    Chaque épisode est donc une tentative (généralement peu convaincante) pour nous faire croire qu'un humanoïde normal solitaire, pacifiste mais intelligent, peut arriver à sauver la Terre d'une nouvelle menace spatio-temporelle rien qu'en analysant un détail du scénario. On ne peut qu'admirer l'exercice de style par rapport à la surenchère des superpouvoirs (surtout que la vraie cause, le budget des effets spéciaux, n'est plus un facteur aussi significatif), même si cela se finit généralement par un Deus Ex Machina avec du jargon ou du blabla pseudo-technoscientifique.

    Ce que j'appelle la 31e saison est en fait seulement la 5e saison de la série redémarrée en 2005 et des efforts ont été faits pour qu'on n'ait pas trop besoin des saisons précédentes (en dehors du fait de reconnaître certains vilains, comme ces stupides Daleks, qui sont le gag récurrent de la série). Le Docteur s'est à nouveau régénéré à la fin de la 4e Saison et c'est donc le 11e Docteur (sachant qu'il a été dit que le Docteur n'aura que 13 vies au total, mais on devine déjà qu'ils changeront cela bientôt).

    Pour l'instant, il n'y a eu que trois épisodes dans la nouvelle version (qui seraient, si je compte bien les épisodes 757-759 depuis le premier épisode de 1963).

    Dans le premier, le nouveau Docteur, encore peu habitué à son nouveau corps, est assez gaffeur et maîtrise mal son TARDIS, ce qui pose des problèmes pour ses rendez-vous quand il se trompe de quelques années. Un des détails que j'apprécie beaucoup est que le Docteur réussit toujours à effrayer ses adversaires sans avoir besoin de tirer un seul coup de feu (on avait les mêmes effets dans les comics avec John Constantine, Hellblazer, dont on n'arrivait pas toujours à comprendre pourquoi les pires démons le craignaient). Cette histoire essaye d'être un conte d'horreur, avec ses monstres polymorphes qui courbent l'espace, mais je ne suis pas sûr qu'elle y arrive vraiment. La fin est presque crédible pour une fois. Ce premier épisode pose aussi les bases d'un Arc narratif (des "fissures" dans l'espace-temps qui vont ouvrir la boîte de Pandore) qui va continuer toute la saison.


    Le Docteur a toujours un "Compagnon" humaine, généralement une Compagne court vêtue et la nouvelle Compagne cette saison est l'une des plus sexy depuis longtemps, la charmante Amelia Pond (jouée par Karen Gillan). On insiste deux fois sur ses origines écossaises. Hélas, elle est tout aussi éperdument amoureuse du Docteur que toutes ses nombreuses prédécesseurs.

    Le second épisode joue sur un dilemme éthique (un peu tiré par les cheveux) et sur l'identité personnelle. L'angoisse bizarre est plus réussie avec ce futur dieselpunk sombre de la reine Elizabeth X. La colonie de Starship UK est tout ce qu'il reste de l'Angleterre et du Pays de Galles (l'Ecosse a fait sécession) et Amy Pond va bientôt découvrir le Sombre Secret qu'elle essayera de dissimuler, y compris à elle-même.

    Le troisième épisode est encore plus quintessentialement britannique avec la Bataille d'Angleterre. Winston Churchill, qui connaît le Docteur, l'appelle depuis 1941 en plein Blitz. Il est en effet victime d'une nouvelle machination des Daleks, des mutants cyborgs racistes génocidaires qui vivent greffés dans des machines à voyager à travers le temps (mais qui échouent quand même à chaque fois lamentablement, ce qui les rend difficiles à prendre au sérieux). La fin où les Spitfire tirent dans l'espace contre le Vaisseau Dalek est ce genre de scène qui paraît très cool et qui "saute par dessus le requin", comme on dit.

    La série Doctor Who a un problème même par rapport au pire épisode de Star Trek par exemple : elle continue à vouloir plaire à des enfants tout en prétendant traiter des thèmes plus adultes (alors que Star Trek était arrivé au stade adolescent). D'où ce rythme didactique si lent où on vous reexplique 25 fois ce qui va arriver. Le suspense existe, mais il ressemble simplement à ces poursuites dans les cauchemars avec des monstres assez mal faits dont on sait bien qu'ils n'atteindront pas leur but. Les gags sont souvent assez prévisibles (le Docteur avec son Tournevis sonique, "le TARDIS est plus grand à l'intérieur qu'à l'extérieur !", les Daleks doivent crier "Exterminate!", etc.). Il y a un charme à cet univers potentiellement infini et pourtant si répétitif mais cela a quelque chose de régressif comme une comptine en boucle.

    Pour l'instant, le 11e Docteur (joué par Matt Smith) me paraît un peu moins sympathique que le 10e mais je crois que ce n'est qu'une question d'habitude. Les critiques anglais ont même déclaré qu'ils jugeaient le 10e plus sombre. Cela doit prouver une différence d'appréhension car je trouvais le 10e Docteur un peu plus "humoristique" et "décalé" au contraire, même si les dialogues étaient déjà du très bon Steve Moffatt, auteur du sitcom Couplings.

    What is it like to be a Whig?


    L'auteur de SF et rôliste britannique Jonny Nexus essaye de nous expliquer ce que cela fait d'être pour le petit parti centriste (les Libéraux-Démocrates) devenu inutile au niveau national depuis trois générations :

    Take John O’Farrell’s admittedly entertaining book about his time as a Labour activist in the electoral wilderness: “Things Can Only Get Better: Eighteen Miserable Years in the Life of a Labour Supporter, 1979-1997″.

    Eighteen miserable years?

    Eighteen?

    Try ninety-four fucking years in the wilderness, and then maybe you can whine about how crap it was. My grandfather was born in 1908, lived until the age of 82, was a Liberal all his life, and yet he died not ever knowing, not even once, what it was like to wake up the morning after a general election knowing that his party had won.

    J'espère seulement que les sondages ne leur donnent pas trop de faux espoirs. De toute façon, avec le système uninominal à un seul tour (le même système idiot que notre Président se met maintenant à défendre), même un réél triomphe au vote populaire des Libéraux-Démocrates ferait gagner... les Travaillistes (puisque les Whigs semblent prendre maintenant plus sur l'aile des Tories).

    The Lupus of News



    Je dois être bon public mais Jon Stewart en train de chanter juste les mêmes obscénités beepées à l'égard d'une chaîne de désinformation est assez pour me réjouir toute la journée.

    The Daily Show With Jon StewartMon - Thurs 11p / 10c
    Bernie Goldberg Fires Back
    www.thedailyshow.com
    Daily Show Full EpisodesPolitical HumorTea Party

    mardi 13 avril 2010

    L'Eglise fait bloc face aux délations

    (volé à l'Album de la Comtesse de cette semaine)

    Une pétition appelait, face à la multiplication des scandales étouffés, à saluer la volonté de l'Eglise à "faire toute la lumière" sur les affaires (car c'est sans doute ce légitime souci de sincère lucidité qui a été le problème).

    Ils trouvaient même une Cabale d'évangélistes fondamentalistes alimentant une Légende Noire par réflexe papophobe. Cela paraît en partie vraisemblable (la vieille cathophobie américaine) mais mélange les intentions de certains messagers et le contenu du message.

    Un Evêque catholique retraité (81 ans) de Grosseto (Toscane), Giacomo Babini revient quant à lui à des bouc-émissaires plus anciens (la source est d'ailleurs un site catholique italien et non chez quelques opposants qui auraient cherché la faute).

    Même si la Conférence épiscopale a aussitôt condamné les délires d'extrême droite de Monseigneur Babini (qui ne vient pas lui, du mouvement intégriste de Saint Pie X comme Richard Williamson), ce genre de résurgence pourrait aller bien plus loin que la maladresse de compétition victimaire du franciscain Raniero Cantalamessa qui avait dit que les critiques contre ces affaires étouffées étaient analogues à l'antisémitisme.

    samedi 10 avril 2010

    [Review] Supplement VI: The Majestic Wilderlands



    Il y aurait en gros deux pôles opposés dans la création d'un monde fantastique de jeu de rôle :

  • (1) la manière classique de mosaïque ou d'agrégat de tout ce qu'on peut aimer mélanger (ce qu'on appelle en anglais "tout mettre dans l'évier", "kitchen sink") ;
  • (2) la manière plus cohérente ou "sérieuse" d'un monde plus organique et unifié.


  • Les univers du début du jeu de rôle étaient très clairement dans la première catégorie en mélangeant Tolkien, les pulps de Howard, Leiber & Moorcock, Poul Anderson Lovecraft, les Mille et Une Nuits, etc.

    Et dans cette catégorie, on peut difficilement faire plus "Old School" (à part peut-être Arduin) que les Wilderlands of High Fantasy, l'univers de campagne de la compagnie Judges Guild créé par Bob Bledsaw. Bledsaw n'essayait même pas de déguiser ses "emprunts" et son univers était vraiment une sorte de grande marmite ou de synthèse de toutes ses lectures (on y croise des allusions aussi bien à Homère, Beowulf qu'aux Dieux de Pegāna ou même à l'URSS des années 70 avec une épave d'un MIG).

    Le "Supplément VI: The Majestic Wilderlands" de Robert S. Conley (qu'on peut acheter pour moins de 6 euros sur DriveThru) est un exemple du foisonnement de ce qu'on appelle la Old School Renaissance. Au lieu de créer un univers idiosyncratique à part, Conley embrasse délibérément la dimension fourre-tout et l'appropriation collective qu'on trouvait à l'origine du jeu de rôle. Les univers de jeu de rôle n'étaient pas des mondes mais bien des collages intertextuels.

    Conley, qui est un vieux fan des Wilderlands des années 70 et qui avait même participé à leur réédition au début de ce siècle, donne ici (pour Swords & Wizardry, rétro-clone du Dungeons & Dragons originel) sa propre version de sa campagne vieille de 28 ans (voir ce site). Sur certains points (notamment les panthéons qui sont d'inspiration terrienne), il me semble qu'il a un peu accru dans ses "Majestic Wilderlands" la cohérence d'ensemble (peut-être même que la mythologie devient d'ailleurs trop unifiée). Mais à certains égards, il ajoute aussi de nouvelles inspirations, comme certains morceaux tirés directement d'Ars Magica (il y a un Ordre de Thoth qui est l'équivalent de l'Ordre d'Hermès) ou de Hârn.

    Mais Robert Conley est surtout un très bon cartographe (il a déjà fait les suppléments Points of Light chez Goodman Games) et une des différences majeures est qu'il jugeait les Wilderlands trop petits pour son but.

    L'échelle des cartes a donc été multipliée par 2,5 (les anciens hexagones de 8 km de long sont devenus des hexagones de 20 km). C'est à peu près comme si la France avait été étirée à la taille de l'Inde. Il y a donc des régions plus vastes et plus peuplées, et pourtant il me semble qu'il y a quand même une unité accrue, peut-être parce que les inspirations Tolkienniennes (la High Fantasy romantique) l'emportent ici sur les aspects Howardiens (la Heroic Fantasy plus cynique). Hélas, les références à l'univers de Blackmoor ont été retirées (on peut éventuellement utiliser la version de Håvard Faanes si on les veut à nouveau ensemble dans le passé de Mystara).

    Le PDF s'appelle "Supplément VI" par référence aux premiers suppléments de D&D et au nouveau supplément non-officiel Supplement V: Carcosa qui avait ajouté plus de références Lovecraftiennes. Sur les 135 pages, environ 80 sont des règles optionnelles pour adapter OD&D avec des classes spécifiques aux Wilderlands comme les Chevaliers, les Paladins de Mitra, les Myrmidons de Set, les Mages de Thoth, les Druides de Trehaen, les Lanceurs de Runes d'Odin, les Griffes de Kali. Une des idées amusantes est que la présentation suit exactement celle d'OD&D.

    Il reste donc environ 50 pages pour décrire le monde, en se centrant autour des "Thariens" (Thabriens dans la version Judges Guild), la confédération de la "Cité-Etat de l'Invincible Suzerain". Un des changements surprenants est que le Suzerain Invincible s'appelle Lucius III (p. 106, comme dans la version de la Cité-Etat licensée par Mayfair Games en 87, où la ville s'appelait "Briarwood") et non pas "Hygelāk XI" (ce qui était une référence au Roi des Gètes dans Beowulf). La célèbre Cité-Etat elle-même reçoit une carte d'ensemble mais pas beaucoup d'informations sur sa situation actuelle.

    Conley a dit avoir voulu éviter le manichéisme de fantasy dans l'organisation religieuse et il évoque le fait que des divinités comme Set ou Hamakhis (qui est ici un Dieu de la Mort sinistre et non pas l'aspect solaire de Horus de l'Horizon que les Egyptiens associaient au Sphinx et à la planète Mars) ne sont pas entièrement "mauvaises" malgré des aspects sanguinaires (Set le Serpent lutte même aussi contre les Démons qui ont infecté son peuple du Viridistan).

    Les Majestic Wilderlands sont parfois très différents des Wilderlands originels mais dans l'ensemble l'histoire paraît un peu plus claire et convaincante dans sa présentation (même s'il me manquerait vraiment un Index et une Chronologie si on n'a pas eu accès aux Wilderlands). On sent bien que Robert Conley y a vraiment passé du temps pendant ces 28 dernières années et son blog montre qu'il aurait de quoi y ajouter plusieurs suppléments détaillés.

    Ce qui est particulièrement appréciable chez un fan quasi-pro comme Conley est sa générosité. On ressent une envie sincère de faire partager une oeuvre attentive et un amour de cette fantaisie. Il n'y a pas chez lui une volonté étriquée, sectaire et nostalgique de certains Papes de l'Old School Renaissance. Il fournit des "boites à outils" à désassembler et à voler pour ses propres univers.

    Pour ma part, je crains d'avoir été un peu "gâché" par les univers du second type avec lesquels j'ai commencé à jouer (notamment Glorantha, qui est relativement ouvert mais bien plus "organique" que les premiers univers fictifs). J'ai donc souvent du mal à isoler des aspects dans mes "vols" d'idées. Je ne suis donc pas sûr de pouvoir copier directement des éléments précis, mais seulement un enthousiasme général de ce qu'il écrit. Le monde des Majestic Wilderlands a un air de Terre parallèle qui peut rappeler les Âges Sombres (notamment avec des noms de Rois francs mérovingiens pour les tribus thariennes), avec une atmosphère un peu tolkienienne, mais il y a peut-être moins d'idées bizarres et baroques qu'on pourrait subtiliser (alors que j'en trouve souvent par exemple dans les suppléments Pathfinder de Paizo). Le supplément doit donc intéresser avant tout un fan des Wilderlands qui voudrait une source d'inspirations pour personnaliser à son tour l'univers de Judges Guild.

    *


    En passant, l'auteur dit qu'il a joué dans son univers de campagne avec les règles de Fantasy Hero ou à GURPS. J. Maliszewski a un argument convaincant sur le fait qu'il est en partie contingent que la "Renaissance de l'Ancienne Ecole" (OSR) soit si D&D-centrique.

    Le renouveau du système "Basic Role-Playing" (par exemple aussi avec OpenQuest) ou la License Ouverte du nouveau Traveller grâce à Mongoose pourrait augurer d'autres Renaissances des jeux de la Seconde Génération de la fin des années 70. Cette autre Renaissance pourrait avoir à la fois cette énergie primitive des premiers jeux de rôle sans être accrochés de manière fétichiste à certains aspects d'OD&D.

    vendredi 9 avril 2010

    Bachmann makes Palin look like Marie Curie

    Quel Juge pour remplacer John Paul Stevens



    Quiddity a un bon critère pour contrer les juvéniles John Roberts (55 ans), Samuel Alito (60 ans) ou Clarence Thomas (61 ans) :

    Obama's pick to replace Stevens:

    Should be a liberal thirty-five year old Asian female (who visits all four of her grandparents on weekends).

    Cutting some slack

    Via le blog de Brian Leiter, les mémoires vraiment fascinantes du philosophe Robert Paul Wolff (né en 1933, ancien professeur à Harvard dans son âge de gloire dans les années 50-60, spécialiste de Kant, anarchiste de gauche et critique du "libéralisme" démocrate de John Rawls).

    Wolff dit qu'aucun éditeur ne voudra jamais de ses mémoires et qu'il préfère donc les publier en ligne. Le paradoxe est que bien qu'il ne soit pas un aussi grand philosophe que ses collègues comme Putnam ou Quine, ses mémoires sont bien plus intéressantes et mieux écrites.

    J'aime beaucoup ce début (qui est certes déjà dans "Mr Chips") :

    The Freshmen I now encounter were born during the Clinton Administration and probably came to some degree of awareness of the larger world during George W. Bush's second term. Anything before that might as well be ancient Rome. For many years, I compensated for this absence of historical memory by extracting my philosophical examples from Star Trek, but even that draws blank stares now, and as I do not get HBO, I cannot substitute The Sopranos. There is nothing that makes you feel older faster than teaching undergraduates.

    Le portrait qu'il donne de Quine rappelle (sans verser dans la facilité d'une critique thersitiste) à quel point il pouvait être un grand philosophe de la logique et un être peut-être assez commun à l'ordinaire (ainsi quand il déclare que l'éthique ne pouvait avoir la même valeur que la logique pour évaluer un candidat parce que "l'éthique est facile").

    Le portrait du jeune génie logique Saül Kripke (qui était déjà renommé avant même d'avoir 18 ans, ayant publié ses premiers théorèmes originaux à 17 ans) est un peu cruel mais conforte bien des descriptions de ses années suivantes à Princeton :
    Saul was a handful. He was, as we would say today, socially challenged, taking up a good deal of the time of the committee of House Senior Tutors who met regularly to deal with student problems. Marshall Cohen ran into one of the Senior Tutors who told of a long meeting they had just suffered through trying to sort out Saul's difficulties with a roommate. (...)

    Saul's father was a Conservative Rabbi, and Saul had had a serious Jewish upbringing. As he talked, he davaned, which is to say he rocked back and forth vigorously. As he talked and davaned he ate, gesturing spastically, and as he talked and davaned and ate and gestured, his food scattered all over the table, as if to illustrate the law of entropy. With gentle understanding, the young Radcliffe student patiently swept the peas up from the table top and put them back on Saul's plate, where they stayed for a bit before being restrewn.

    I have often wondered whether Saul, brilliant though he undoubtedly was, ever understood how much slack everyone was cutting him, from Quine on down. Somehow, I think not.

    Il y a un contraste étrange entre le Kripke affable et humoristique qu'on imagine en lisant ses conférences retranscrites (comme son oeuvre la plus illustre Naming & Necessity) et les récits de ses cours ou de sa personnalité où il a l'air quasi-autiste et névrosé (même le personnage du roman de Rebecca Goldstein, The Mind-Body Problem, qu'on dit fondé sur Kripke, n'atteint pas ces dimensions).

    L'Université de Princeton a finalement discrètement nommé Kripke "émerite" à moins de 60 ans pour de multiples raisons mais notamment, si j'ai bien interprété les témoignages qui me semblent honnêtes, parce que certains étudiants se plaignaient de ce que le brillant philosophe soit incapable de leur faire le moindre cours cohérent ou même d'avoir des interactions normales avec eux. Kripke partait généralement sur des objections et réponses à ce qu'il percevait comme des attaques dans la littérature. Pour saisir cette opacité, il faut s'astreindre à lire un de ses pires articles (du point de vue de la forme et non du génie du contenu), "Is There a Problem About Substitutional Quantification?", qui semble plein de circonvolutions tortueuses au point d'en devenir un exercice de masochisme (exactement le contraire de Naming & Necessity qui a été enregistré et semble - parfois trompeusement - facile à suivre).

    mardi 6 avril 2010

    Impact de citation



    Je ne sais pas sur quels journaux cette étude portait mais ces statistiques sur les références à des livres dans les citations des Humanités en 2007 continuent très fortement à avantager la "Théorie française" des années 70 :

    Michel Foucault (1926-1984) Philosophy, sociology, criticism 2,521
    Pierre Bourdieu (1930-2002) Sociology 2,465
    Jacques Derrida (1930-2004) Philosophy 1,874
    Albert Bandura (1925- ) Psychology 1,536
    Anthony Giddens (1938- ) Sociology 1,303
    Erving Goffman (1922-1982) Sociology 1,066
    Jurgen Habermas (1929- ) Philosophy, sociology 1,049
    Max Weber (1864-1920) Sociology 971
    Judith Butler (1956- ) Philosophy 960
    Bruno Latour (1947- ) Sociology, anthropology 944
    Sigmund Freud (1856-1939) Psychoanalysis 903
    Gilles Deleuze (1925-1995) Philosophy 897
    Immanuel Kant (1724-1804) Philosophy 882
    Martin Heidegger (1889-1976) Philosophy 874
    Noam Chomsky (1928- ) Linguistics, philosophy 812
    Ulrich Beck (1944- ) Sociology 733
    Jean Piaget (1896-1980) Philosophy 725
    David Harvey (1935- ) Geography 723
    John Rawls (1921-2002) Philosophy 708
    Geert Hofstede (1928- ) Cultural studies 700
    Edward W. Said (1935-2003) Criticism 694
    Emile Durkheim (1858-1917) Sociology 662
    Roland Barthes (1915-1980) Criticism, philosophy 631
    Clifford Geertz (1926-2006) Anthropology 596
    Hannah Arendt (1906-1975) Political theory 593
    Walter Benjamin (1892-1940) Criticism, philosophy 583
    Henri Tajfel (1919-1982) Social psychology 583
    Ludwig Wittgenstein (1889-1951) Philosophy 583
    Barney G. Glaser (1930- ) Sociology 577
    George Lakoff (1941- ) Linguistics 577
    John Dewey (1859-1952) Philosophy, psychology, education 575
    Benedict Anderson (1936- ) International studies 573
    Emmanuel Levinas (1906-1995) Philosophy 566
    Jacques Lacan (1901-1981) Psychoanalysis, philosophy, criticism 526
    Thomas S. Kuhn (1922-1996) History and philosophy of science 519
    Karl Marx (1818-1883) Political theory, economics, sociology 501
    Friedrich Nietzsche (1844-1900) Philosophy 501

    "L'Invasion continentale" est donc moins endiguée que je le croyais. L'aspect "interdisciplinaire" de Michel Foucault explique sans doute cette première place. Ainsi que le fait qu'il a réussi à faire croire qu'il était cette fameuse "caisse à outils" dont on devait se servir (même si je ne vois pas quels outils sont vraiment féconds : pas épistémé en tout cas).

    Albert Bandura (4e) est un psychologue spécialiste de l'apprentissage social et il est le psychologue le plus cité du XXe siècle (devant Freud maintenant !).

    Je suis étonné de voir la faiblesse des philosophes analytiques dans le classement. A part l'oeuvre politique de John Rawls, il n'y a presque personne (sauf si on compte Wittgenstein comme "analytique"). Cela vient sans doute en partie du fait qu'on ne parle que de références à des livres alors que la philosophie analytique est encore surtout centrée sur des articles à l'imitation des scientifiques.

    Judith Butler apparaît aussi comme la plus célèbre représentante du mouvement des Gender Studies (elle est la seule femme avec Hannah Arendt, et elle est la benjamine du classement, à seulement 54 ans).

    Mais cela illustre aussi qu'on cite plus certains livres récents comme des signes d'entrée dans ce que je ne sais plus qui appellerait "le champ"(1) (c'est pourquoi on cite nettement moins d'oeuvres précises de Marx, Nietzsche ou Kant que Deleuze ou Derrida).

  • (1) Les usages sociaux de la science. Pour une sociologie clinique du champ scientifique, INRA 1997, p. 27.

  • dimanche 4 avril 2010

    Oikouménè (2e édition)



    Oikoumene (du grec οἰκουμένη, "le Monde habité") est la seconde édition d'un jeu de rôle "indépendant" sur l'époque hellénistique par Jérémie et Pascal Coget. Je l'avais mentionné dans la liste des jeux de rôles sur l'Antiquité. Cette nouvelle version de février 2010 fait 208 pages avec une couverture rigide et est diffusée par l'éditeur toulousain Les Ludopathes.

    Il y a déjà quelques reviews sur le GRoG, ce qui va me permettre d'y renvoyer pour plus de détails, notamment sur les règles comme je pense me servir du jeu surtout pour ses parties descriptives sur le contexte.

    La présentation est devenue quasi-professionnelle (à part peut-être quelques illustrations). J'aime surtout la quantité de cartes car c'est un des éléments qui me paraît le plus utile en jeu. La carte globale du monde est inspirée des visions subjectives de l'époque comme celles qu'on peut trouver à la fin de l'édition GF des Histoires d'Hérodote. Il y a aussi des cartes beaucoup plus détaillées de plusieurs régions comme l'Italie, la Grèce et l'Egypte et même la cité d'Alexandrie (p. 171 - ce qui m'intéresse pour ma propre campagne de Momie).

    Une des trouvailles que j'aime le plus est les citations très nombreuses de Polybe ou d'autres auteurs qui immergent mieux dans la période que bien des résumés.

    Le jeu de rôle antique purement historique est assez rare et le plus souvent le jeu de rôle ajoute toujours aussi de la mythologie. Ici, Oikouménè est un peu à la frontière avec un contexte assez proche du réalisme historique (l'Europe et le Proche-Orient en -270) mais avec quand même quelques règles sur la magie divine et des caractéristiques de monstres mythiques.

    Le contexte choisi est donc -270, soit dans le calendrier grec la troisième année de la 127e Olympiade. Alexandre le Grand (et Aristote) est mort depuis 50 ans, et les Diadoques immédiats sont morts également. Les Celtes viennent de ravager le nord de la Grèce. Antigonos II règne en Macédoine. Ptolémée II règne en Egypte et il a eu le temps de développer Alexandrie et sa Bibliothèque (avec Zénodote puis l'écrivain Callimaque qui en dirige le catalogue littéraire). Antiochus Ier, fils de Seleucos, règne sur l'Asie. Mithridate Ier a fondé la Royaume du Pont. A l'ouest, les colonies grecques commencent à perdre leur indépendance : deux Cités-Etats républicaines, Rome et Carthage, vont bientôt se disputer la Méditerranée et Rome a fini l'unification du sud de l'Italie après la mort de Pyrrhus d'Epire.

    Les informations sont nombreuses et il est très agréable de retrouver sous forme d'Atlas de jeu de rôle ce dont on a besoin pour une campagne avec un périple à travers le monde connu.

    Je crois que comme la plupart des rôlistes, je trouve plus de facilité à du fantastique un peu baroque, excessif et irréaliste qu'à un jeu vraiment historique. Oikouménè est plus sobre dans son usage du fantastique et le jeu a même un petit chapitre annonçant les événements futurs come la Première Guerre punique qui s'annonce.

    Le livret de base inclut toute une campagne où les personnages sont des agents alexandrins contre un complot égyptien. Il y a des touches de fantastique mais la magie du jeu semble assez discrète (il y a d'ailleurs assez peu de sortilèges, 28 "Prodiges" qui sont des bonus et ils sont associés à des cultes et cultures différentes).

    En passant, le livre dit qu'il y a un scénario gratuit en ligne "Les Masques d'Osiris" qui doit s'intercaler dans la campagne d'Alexandrie mais je ne l'ai pas encore trouvé.

    Le scénario téléchargeable en pdf (issu d'un concours de scénario) suppose des personnages clients du futur tyran Hiéron (II) à Syracuse, et là encore l'histoire paraît assez "réaliste" si ce n'est une partie qui inclut l'invocation d'un Démon. C'est une question de goût mais je crois que si j'y jouais (peut-être avec le Basic System), j'augmenterais vraiment la part d'uchronie mythique en ajoutant des risques d'un Alexandre zombie (comme dans la série de romans de Thomas Harlan Oath of Empire).

    Les auteurs promettent un Ecran et des suppléments. Le fait qu'il y ait déjà plusieurs scénarios disponibles donne l'espoir d'un vrai suivi pour le jeu, ce qui est ce qui manque souvent aux jeux indépendants.

    jeudi 1 avril 2010

    [Comics] Sans Poisson



    Depuis le début 2010, ce support en ligne interactif est devenu vraiment indolent. Oui, il faut en parler à la 3e personne, je n'y suis pour rien, c'est en fait la faute du Blog lui-même.

    Mais au moins, on ne pourra pas me (enfin, lui) reprocher d'avoir écrit un post du 1er avril et rien que pour cela, un Weblog Award ne paraîtrait pas vain. Parce que franchement, l'Internaute ne peut plus rien lire le 1er avril sans ces messages oxymoriques prévisibles sur l'intelligence de Paul Virilio, sur la dignité de notre Président ou sur la probité de Silvio Berlusconi. Je le sais, c'est ce que je viens d'effacer.

    Finalement, un bon post du Premier Avril n'est même plus dans la "crédibilité" ou l'effet de surprise mais dans le travail qu'il représente comme cette proposition d'une nouvelle League of Extraordinary Gentlemen du XXe siècle (qui reprend l'idée d'Alan Moore sur le crossover des fictions victoriennes mais pour l'adapter à la télévision et les nanars américains des années 80).

    L'humoriste Mighty God King renonce même complètement au Premier Avril mais a une recension qui résume bien l'état actuel du Multivers DC Comics et la rumeur qui prétend qu'ils vont un peu diminuer la noirceur sanguinaire de ces dernières années :

    DC’s output is just kind of joyless and tedious these days, not in a particularly vicious or cruel way but just kind of there, and everybody knows it, and “Brightest Day” isn’t going to be a turnaround to “more innocent and fun stories” because comics companies have learned that they can spike their sales for a few months every time they promise that and then it’s back to the emo snuff porn that the hardcores want.

    Son analyse du style "formulaic" de Geoff Johns et de son incapacité à écrire une résolution satisfaisante sans un deus ex machina ad hoc (ça fait beaucoup de latin) me paraît très convaincante. Johns est devenu le scénariste principal du Multivers mais sa technique très professionnelle et répétitive détruit toute surprise et attachement de longue durée à ses créations.