jeudi 19 février 2009

Coalitions libanaises



L'intellectuel ex-trotskiste ex-néo-conservateur britannique Christopher Hitchens (qui peut avoir quelques bons moments entre deux phases délirantes quand il est sobre) se serait fait tabasser à Beyrouth par des militants du Parti social-nationaliste syrien qu'il avait insultés dans la rue.

Le Parti social nationaliste syrien est un cas intéressant puisqu'il s'agit d'un parti arabe d'extrême droite (qui a même adopté une version déformée de la svastika) mais qui est dans une position particulière.

Premièrement, comme l'indique son nom, c'est un parti nationaliste qui défend le projet d'une "Grande Syrie" qui comprendrait non seulement le Liban mais aussi Israël, la Palestine, la Jordanie voire Chypre, l'Irak, le Koweït et une partie de la Turquie. Mais c'était historiquement un Parti anti-communiste et ennemi du Baath syrien (qui défendait en théorie un nationalisme panarabe et non pas seulement syrien). Le Parti social-nationaliste fut même longtemps interdit en Syrie (même si aujourd'hui ils y sont reconnus avec 2 sièges et qu'ils font partie de leurs agents au Liban).

Mais il fut fondé par un Syrien grec orthodoxe et a encore aujourd'hui des électeurs chrétiens pro-syriens (même s'il est laïc dans son fascisme et que leur leader actuel était un chiite). Il n'a que 2 sièges sur 128 au Liban et est allié à l'Alliance du 8 Mars, la coalition pro-syrienne qui comprend surtout le mouvement Amal (Sunnites) et le Hezbollah (Chiites), en alliance avec certains Chrétiens maronites.

La coalition du 8 mars atteindrait environ 56 sièges sur les 128, contre l'Alliance du 14 Mars, la coalition anti-syrienne (surtout composée de Sunnites et de Druzes). Depuis 2006, le "Courant Patriotique libre", les Maronites partisans du Général Michel Aoun, ont en partie renversé leur alliance en se rapprochant de l'Alliance du 8 mars.

Le Président de la République libanaise depuis mai 2008 est Michel Suleiman, un Chrétien maronite, est le représentant de la "neutralité" de l'armée et a été choisi comme compromis entre l'Alliance du 8 mars et l'Alliance du 14 mars, en remplacement d'Emile Lahoud, qui était clairement pro-syrien. Le premier ministre reste Fouad Siniora, de l'alliance du 14 mars, sunnite proche de la famille Hariri et donc anti-syrien.

Mais le gouvernement de Fouad Siniora est lui-même divisé autant que l'Assemblée.

Sur 30 membres (en comptant le Premier ministre), 16 sont membres de l'Alliance du 14 mars mais 11 sont membres de l'Opposition du 8 mars. Le Hezbollah a hérité du Ministère du Travail et le Ministre des affaires étrangères Faouzi Salloukh est un Chiite proche de leurs positions. Même le Parti social-nationaliste syrien (qui avait pris les armes contre le gouvernement en 2006 avec le Hezbollah et d'autres mouvements) a obtenu un poste pour l'ancien leader du Parti, le chiite Ali Kanso comme "Ministre d'Etat" (sans portefeuille ?).

On oppose souvent guerre civile et gouvernement de coalition mais le Liban illustre qu'on peut avoir les deux à la fois : une très grande coalition qui comprend la majorité et l'opposition et en même temps une Guerre civile larvée qui ne demande qu'à éclater à nouveau.

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