jeudi 25 octobre 2012

Un Résumé de Faerie Queene (1596)


The Faerie Queene d'Edmund Spenser (1552-1599), publié à la fin du XVIe siècle, fait partie des "Grands Illisibles" du Canon occidental, un énorme poème que seuls des érudits et les étudiants en littérature anglaise doivent encore lire en entier. Cela paraît nettement plus ennuyeux que l'Orlando Furioso (1532) de l'Arioste qu'il imite, car ce dernier a encore un peu d'humour. Non seulement le poème est long et répétitif mais l'allégorie morale et religieuse lourde (la Gentille Eglise anglicane contre les Méchants Catholiques) et son ton courtisan envers la Monarque Elizabeth Ie ne correspond plus à notre goût (je passe sur le fait que Spenser est aussi connu pour avoir préconisé sérieusement un génocide de tous les Irlandais pour purifier ethniquement cette île pour les Anglais).

Mais ce texte a eu une telle importance dans l'imaginaire anglo-saxon et donc dans la fantasy tout court qu'on ne peut pas ne pas en tenir compte (la généalogie des Elfes au Livre II, Chant X paraît presque tirée du Silmarilion). On comprend que certains blogs de jeu de rôle s'en soient servi comme inspiration.

Le poème (inachevé) est composé de six livres (sur XII ou XXIV prévus), trois publiés en 1590 et trois autres en 1596. Chaque Livre correspond à une Vertu morale et à de nouveaux héros pseudo-arthuriens : Piété (le Chevalier à la Croix Rouge), Tempérance (Guyon), Chasteté (Britomart), Amitié (Cambell), Justice (Arthegall) & Courtoisie (Calidor, plus un septième posthume, incomplet et plus abstrait sur le caractère inconstant du monde terrestre).

A mon sens, les meilleurs livres sont la partie centrale (livres III-V, avec le tournoi autour de Florimell, qui relie les différents personnages) même si les amours annoncées de la guerrière Britomart et d'Arthegall le Juste ne trouvent jamais de résolution satisfaisante dans l'épopée telle qu'elle est.



Livre I : Georges et la Vertu de Sainteté
Le premier livre est centré sur la relation entre le Chevalier à la Croix Rouge sur Champ d'Argent (Saint Georges, la Chevalerie anglaise) et Una (la Vraie Foi, l'Eglise anglicane) - le Chevalier a une armure magique mais aussi un écuyer fidèle, un Nain. Georges ignore sa vraie identité et ne sera nommé que le Chevalier à la Croix Rouge jusqu'à la fin du livre. Né en Angleterre, il a été élevé par les Fées de la Reine Gloriana et vient accompagner Una mais un sorcier maléfique Archimago (le Pape) passe son temps à tenter de les séparer par ses illusions et métamorphoses en faisant croire à l'infidélité d'Una ou en prenant la forme de Georges. Una manque d'être violée par le perfide chevalier Sansloy mais est (ironiquement) sauvé par des Satyres, dont Satyrain, chevalier demi-satyre qui résiste à sa nature bestiale.
Le Chevalier à la Croix est conduit à la Maison de l'Orgueil où il est tenté par la reine Lucifera et surtout par l'hypocrite Duessa (l'Eglise catholique), qui feint la Vraie Foi. Il est fait prisonnier par le Géant Orgueil (amant de Duessa) mais, grâce à son écuyer nain, il est délivré par le jeune roi Arthur (qui ignore encore ses origines). Il finit par être soigné à la Maison de la Sainteté (où la Contemplation enjoint le Chevalier à rester agir dans le monde séculier tant qu'il n'aura pas fini sa mission pour qu'un jour Albion devienne la "Nouvelle Jerusalem").
Georges vient ensuite à la fin du Livre affronter le Dragon qui saccage le royaume du père d'Una, le Jardin d'Eden. Après un long combat où il est même tué mais ressuscité deux fois par une source magique et par l'Arbre de Vie, il finit par terrasser le Dragon. Il est fiancé à Una mais doit d'abord servir pour 6 ans la Reine des Fées Gloriana.

Livre II : Guyon ou la Vertu de Tempérance
Un Pèlerin vient chez Gloriana demander l'aide contre la maléfique Acrasia (Intempérance). Sire Guyon est envoyé en quête contre elle, mais il est manipulé par Archimago (qui s'est encore évadé) qui tente par ses mensonges de le détourner contre le Chevalier à la Croix Rouge.
Guyon trouve la malheureuse Amavia qui se suicide dans ses bras : la sorcière Acrasia avait séduit l'amant d'Amavia, Mordant, et l'avait ensuite maudit et tué dès qu'il était revenu vers Amavia. Guyon confie l'enfant de deux amants défunts, Ruddymane, à Medina et doit affronter les deux frères Pyrocheles (Passion furieuse) et Chymocheles (Inconstance) et ensuite aux Enfers Mammon (Richesse).
Archimago vole l'épée d'Arthur pour la donner aux deux frères passionnés mais avec l'aide du Pèlerin, Arthur vient sauver Guyon et récupérer ses armes magiques avec le Bouclier de Gloriana. Arthur et Guyon vont ensemble dans le Château d'Alma (l'Âme) et y visitent les différentes facultés de l'Âme, Imagination, Mémoire et Raison. Arthur et Guyon, avec l'aide du Pèlerin, doivent affronter les deux sorcières Impuissance et Impatience et divers Péchés & Monstres marins, avant d'arriver au domaine d'Acrasia qu'ils arrêtent pour ses crimes.

Le Chant X de ce Livre II a (dans les Palais de la Mémoire d'Alma) la Chronique des Rois de Faërie avec la liste généalogique des monarques des Fées (et Victor Hugo traduit d'ailleurs ce passage en français dans son William Shakespeare) : Elfe (le premier Elfe, créé directement par le Titan Prométhée), Elfin (qui régnait sur l'Inde et l'Amérique), Elfinan (qui fonda la cité de Cléopolis), Elfiline (qui en fit la Muraille d'or), son fils Elfinell (qui vainquit les Gobelins), Elfant (qui construisit la tour de Panthée en cristal), Elfar (le tueur de Géants polycéphales), Elfinor le Magicien (qui fit le Siège de Verre et le Pont d'Airain, qui résonne comme le tonnerre), puis les 700 Princes issus d'Elfinor, Elficlée qui eut deux fils Elferon (mort prématurément) et Oberon, lequel laissa ensuite son trône par testament à Tanaquil dite "Gloriana" (ou Gloriande, la Reine Mab, Titania). Le mélange de références classiques gréco-romaines (Prométhée, Tanaquil) et d'imaginaire plus médiéval (Oberon) est intéressant.


Livre III : Britomart ou la Vertu de Chasteté
L'histoire se tourne vers une nouvelle héroïne, la guerrière Britomart, jeune fille en armure de chevalier (inspirée de la Bradamante de l'Arioste) et symbole de la vertu féminine. Après avoir vu le chevalier Arthegall dans un miroir magique de l'Enchanteur Merlin (qui vit captif dans une caverne avec ses serviteurs Elfes), elle est tombée follement amoureuse de lui et est partie en quête d'Arthegall avec sa nourrice Glaucè déguisée en écuyer. Elle vainc en duel Sire Guyon, puis elle sauve le Chevalier à la Croix Rouge dans le Château de la Joyeuse Garde (dont la Maîtresse tente de la séduire).
Puis Britomart voyage dans les océans et c'est là qu'elle blesse grièvement le chevalier Marinell, fils de Cymodocé, une nymphe marine, dont on avait dit qu'il tomberait du fait d'une femme (mais on avait présumé que ce serait par passion amoureuse).

Cette blessure de Marinell déclenche la panique de celle qui l'aime, la malheureuse fée Florimel , qui s'enfuit éperdue à cheval. Les chevaliers de la Table ronde et notamment l'écuyer du Roi Arthur, Timias, tentent de retrouver cette mystérieuse et belle fugitive. Timias rencontre alors dans sa quête les deux soeurs Belphoebe (dont il tombe amoureux) et Amoret, deux filles du Soleil élevées dans les Jardins d'Adonis, dont la première a choisi la voie de Diane la Vierge et l'autre la voie de Vénus et est éprise de Scudamore.
Le chevalier Satyrain (le demi-satyre vu dans le Livre I) participe aussi à la recherche de la fugitive Florimell, poursuivie par des monstres d'une Sorcière, mais il ne trouve que sa Ceinture, ancienne Ceinture de Vénus (cette Ceinture deviendra le bien convoité dans le Livre IV). Il rejoint Britomart et l'inconstant Paridell, séduisant descendant de Paris de Troie.
Ils sont hébergés chez le jaloux Malbecco et Paridell séduit l'épouse de Malbecco, la volage Hellenore, avant de l'abandonner dans le bois des Satyres. Malbecco engage alors comme mercenaire le brutal Braggadochio pour récupérer son épouse mais cette dernière, décidément insatiable, part avec les Satyres pendant que Braggadochio vole l'argent du riche cocu. Malbecco devient le Démon de la Jalousie.
La vierge Britomart part ensuite aider Scudamore (fiancé d'Amoret). Elle affronte les tentations de Cupidon et délivre Amoret de celui qui l'avait enlevée.




Livre IV Cambell et Triamond, ou la Vertu de l'Amitié
Duessa (l'hypocrite du Livre I) et Atè (l'Erreur) font croire à Scudamore (fiancé d'Amoret) que c'est Britomart (qu'on prend pour un homme) qui aurait enlevé Amoret. L'infidèle Paridell, le chaste Satyrain et d'autres chevaliers se battent pour celle qu'ils croient être la Dame Florimell (et qui n'est en réalité qu'un double magique façonné par la Sorcière qui voulait la tuer).
Ils rencontrent Cambell et Triamond, les amis parfaits et on revient sur leur histoire. Cambell avait promis la main de sa soeur Canacé à celui qui pourrait le vaincre et il tua ainsi les deux frères de Triamond, Priamond et Dyamond, dont les âmes passèrent alors successivement dans le corps de leur dernier frère, Triamond.  Cambell avait un Anneau de régénération et Triamond disposait ainsi de deux "Vies" supplémentaires par les âmes de ses frères défunts. Leur combat fut donc interminable jusqu'à ce que leurs soeurs les réconcilient et qu'ils deviennent beaux-frères. Les deux amis participent ensuite au Grand Tournoi organisé par Satyrain pour avoir la Ceinture de Florimell, et chaque ami tente de se sacrifier pour l'autre.
Arthegall (déguisé sous l'armure du "Chevalier Sauvage") vient participer au Tournoi et est battu par Britomart, qui n'a pas reconnu celui qu'elle recherchait. A la fin du Tournoi, Britomart est la gagnante mais elle refuse la Fausse Florimell, qui choisit d'aller avec le vil Braggadochio. Amoret est à nouveau enlevée par un homme des bois. Arthegall et Scudamore attaquent Britomart mais découvrent enfin qu'elle est une femme. Arthegall tombe amoureux de Britomart mais celle-ci n'ose pas lui avouer ses sentiments.
Pendant ce temps, dans les Bois, le Roi Arthur délivre Amoret et Belphoebe (soeur d'Amoret), suite à un quiproquo, se croit trahie par l'écuyer Timias.
Dans les Océans, Marinell, le Chevalier des Mers (qui avait été blessé par Britomart dans le Livre III), obtient de sa mère la nymphe Cymodocé et de Neptune qu'ils fassent libérer la vraie Florimell (qui était séquestrée par le Vieux de la Mer, Protée).


Livre V Arthegall ou la Vertu de Justice
Arthegall a été élevé par la déesse de la Justice Astrae et elle lui a offert Chrysaor, une épée qui tranche tout, les armes d'Achille et un écuyer au corps de fer nommé Talus. Il était en quête pour la Reine Gloriana pour aider Irène (la Paix) contre Grantorto. Il affronte diverses épreuves pour montrer ce qu'est la Justice, dont plusieurs Jugements de Salomon. Il lutte contre un Géant qui prétend imposer une égalité stricte à la place de l'équité. Pendant les noces de Marinell et Florimell, Braggadochio vient avec le simulacre magique, la Fausse Florimell, mais celle-ci disparaît devant l'original.
Arthegall est vaincu par Radigonde, une Reine Amazone en guerre contre les hommes, et elle le contraint à porter une robe et à tisser à ses pieds (comme Hercule chez Omphale). Britomart, prévenue par Talus l'Homme de Fer, part pour le délivrer et au Temple d'Isis, elle reçoit la prédiction qu'elle aura un jour un fils d'Arthegall qui les dépassera en vaillance (la prédiction ne sera jamais réalisée dans le poème). La guerrière vainc Radigonde et devient Reine des Amazones, dont elle supprime les anciennes lois pour restaurer les droits des hommes.

La suite redevient une allégorie politique transparente sur l'actualité des années 1590. Arthegall et le Roi Arthur capturent l'hypocrite Duessa (l'Eglise catholique) et ils la jugent pour ses crimes, malgré les hésitations de la Mercilla (la Compassion). Ils doivent ensuite défendre les enfants de Belgè (les Pays-Bas) contre le monstrueux Geryoneo (l'Espagne). Arthegall part ensuite lutter contre le Géant Grantorto (la Sédition des Guerres de religion) qui a séduit Floeurdelis (la France). Bourbon (Henri IV), l'ancien ami de Floeurdelis, a trahi la Vraie Foi (le Protestantisme) pour lui plaire. Après avoir vaincu Grantorto, Arthegall retourne avec Talos vers Faërie.

Livre VI Calidor ou la Vertu de Courtoisie
Au retour d'Arthegall en Faërie, Sire Calidor, le plus courtois des Chevaliers, part à son tour en quête contre un monstre rencontré par le Chevalier de Justice, la "Bête Braillarde" (Blatant Beast) aux Mille Langues, symbole de la Calomnie. Les allégories sur la rumeur et la renommée tournent autour de la pudeur et de la réputation des femmes par des historiettes pastorales ainsi que cette vertu de "courtoisie". Je ne sais si c'est la lassitude de la fin de l'épopée mais cela me paraît être le Livre le plus ennuyeux de tout le poème.

Le prétendu "livre VII" laissé à l'état d'ébauche incomplète porte sur la Mutabilité, personnification du changement, et on ne voit absolument pas le rapport entre cette allégorie métaphysique ou cosmologique avec les six livres précédents sur les vertus morales. La Mutabilité vient demander aux Dieux (et notamment à Diane Déesse de la Lune) à régner sur la Nature et la Nature (Isis Voilée) donne le verdict que c'est plutôt tout l'univers qui règne sur la Mutabilité puisque tout change mais que le changement a pour fin l'accomplissement vers un état permanent. Cette conclusion aristotélicienne annonçait peut-être un autre développement plus théologique ?

lundi 22 octobre 2012

[JDR] Archworld (1977)

Source de l'image : Tome of Treasures

Chivalry & Sorcery a eu plusieurs cadres de campagne que j'ai déjà évoqués, dont le monde fictif d'Archaeron (supplément Arden) pseudo-médiéval, créé par Ed Simbalist. Mais pendant l'année même de préparation de C&S en 1977, l'illustrateur du jeu Mike Gilbert (1947-2000) publia (avec sa compagne Sheila Gilbert) son propre univers de campagne, Archworld, avec des règles de combats terrestres et maritimes. Cet univers n'était pas utilisé pour le jeu de rôle mais pour des campagnes de wargames avec figurines (tout comme C&S prévoyait d'ailleurs de maintenir les deux types de jeu en parallèle). Le livre passe donc presque tout son temps à décrire les peintures des drapeaux ou l'organisation des bataillons et pas les sociétés ou l'histoire. Il n'y aurait sans doute pas assez d'informations pour y faire un jeu de rôle mais cela reste quand même un des premiers univers fantastiques de jeu publiés après Glorantha, Tékumel ou Magira/Midgard (qui commencèrent tous pour des wargames ou des jeux de gestion de royaumes).

Archworld n'est pas très "médiéval". Même s'il y a les habituelles influences tolkieniennes, des Nains (les Terakyn), des Elfes (les Wodkyn), des Gobelins (les Ashkara), des Trolls (les Undra) avec en plus des Centaures (qu'on voit en armure médiévale sur la couverture face à un Terakyn), le modèle semble souvent aussi s'inspirer partiellement des figurines de Tékumel de MAR Barker, avec un mélange d'art d'Amérique pré-colombienne pour les divinités et de technologies militaires européennes du XVIe-XVIIe siècle (poudre à canon, armures de plaques des Guerres d'Italie jusqu'à la Guerre Civile britannique). Gilbert aimait tant ce concept qu'il réalisa la même année le wargame Down Styphon! sur les romans de H. Beam Piper sur Lord Kalvan, qui opèrent le même mélange de fantasy et d'armées du XVIIe siècle.



On est censé être sur une Terre parallèle mais Archworld a eu de très nombreuses Lunes et même un Anneau brillant d'astéroïdes appelé "l'Arche" qui donne son nom à ce monde. Encore aujourd'hui, les cieux ont gardé 42 Lunes (7 "Grandes Lunes" et 35 "Petites Lunes") qui font le cycle du calendrier : les principales sont par exemple Oltmanus de l'Eclipse, le Spectre sauvage, Sans-Visage ou le Petit Crâne. Les seules divinités mentionnées sont "la Mère de Tout" (déesse de la fécondité et de la vie), Almack (Dieu du Changement) et le sinistre "Sans Nom".

Le Monde de l'Arche sort d'un cataclysme où plusieurs de ses satellites sont tombés sur la planète, où des astéroïdes et des éruptions volcaniques ont détruit des continents entiers. Cela entraîna une ère glaciaire qui commence à peine à reculer dans les zones équatoriales de ce qui aurait été à peu près notre Afrique. Au nord dans les Détroits des Glaciers de Basum, des hordes de peuples inhumains surnommés l'Eternelle Tempête adorent l'Innommable et menacent de venir détruire les civilisations des zones plus hospitalières pour les sacrifier à l'Innommable. Le chef de ces hordes est Caer Carenna et il s'est allié à une confédération des Sept Sorciers Exilés de Car-Muth-Mey (Elcor, Halvar, Jasmin, Kelvar, Ormund, Naumun et Zengar).



La grande Baie à l'ouest du continent africain (de climat méditerranéen) s'appelle le Bassin des Métaux et c'est là que se trouvent les cinq grands Etats qui ont pu développer la métallurgie, les mousquets et les bombardes : l'Empire de Palladius (le Roi Malantine Meleadar), Abayados, Emania, l'Electorat de Pedryvan et Xelha. Les autres Etats plus éloignés de cette Baie sont demeurés plus archaïques. L'Electorat de Pedryvan est sous le contrôle réel de l'Ordre religieux et militaire des Mains Argentées qui adore le cycle de l'Arche et des Petites Lunes. Les dix Monastères de l'Ordre des Mains Argentées organisent les Légions des Etoiles Filantes (les illustrations semblent en faire à peu près des Ottomans).



Plusieurs cités-Etats ont encore gardé leur indépendance : la Cité des Tours Blanches (alliée de l'Empire Palladien et de certaines tribus de Centaures des Plaines de Cil, leurs chevaliers évoquent des Hussards Ailés polonais mais ils ont aussi surtout des hallebardes), les Principautés Atelkine (alliées de Zelha) et l'Ordre des Chevaliers de Cil (à l'est des Etats Atelkins), dirigé par le Primat Serre-d'Oiseau. L'Ordre des Etoiles, lui, a ses douzaines de châteaux plus au nord et mène une Croisade religieuse contre les Hordes de l'Eternelle Tempête et son équivalent adorant l'Innommable, l'Ordre des Sceptres du Nord. Enfin, le Sorcier Leymer est une force à lui seul, qui a organisé la résistance contre la Ligue des Sept Sorciers exilés de Car-Muth-Mey.


Archworld montre l'esprit de ce qu'un artiste "hobbyiste" figuriniste pouvait faire dans les années 1970 en créant ses propres références fantastiques pseudo-historiques. Archworld ne me semble pas avoir eu d'influence claire sur d'autres cadres fantastiques. Les 7 Lunes et leur cycles ne sont qu'une coïncidence avec l'univers de Jorune (c'est un thème habituel de la fantasy) et j'imagine que les armures Renaissance de Palladius ne ressemblent aux armures ouvragées de Palatia (dans l'univers d'Artesia) que par une ressemble superficielle (même si l'auteur Mark Smylie est un amateur de jeu de rôle des années 1970 comme les Wilderlands of High Fantasy).

Bien qu'Archworld n'ait rien à voir avec l'univers d'Archaeron, j'avais cru d'abord à un lien possible. Mais Archaeron est vraiment une Europe parallèle alors qu'Archworld a des influences nettement plus hétéroclites avec ses cités-Etats olmèques en armures européennes. Une adaptation à C&S demanderait donc sans doute beaucoup de travail, notamment parce que la Magie d'Archworld me paraît un peu vague : relativement faible en combat terrestre (parce que l'auteur ne voulait pas déséquilibrer la partie tactique) mais assez puissante pour les combats maritimes.

mercredi 17 octobre 2012

Chevalerie & Sorcellerie (2) La Magie

Voir partie précédente, où nous avions commencé à créer un personnage pour C&S, Indis l'Elfe sylvestre.

Les Arts Magiques
Une des plus grandes richesses de Chivalry & Sorcery est la Magie, qui occupe 40 des 128 pages ultra-serrées. Là où la plupart des jeux ont une règle synthétique sur la Magie, C&S multiplie des systèmes assez distincts qui ont un charme séparé (notamment l'Alchimie, qui sonne plus proche des textes anciens que la plupart des autres versions ludiques que je connais). Les Arts Magiques sont divisés en 4 grands types : Magie Naturelle (Shamans, Mediums, Transe sous drogue, Incantations...), Arcanes Mineures (Alchimiste, Artificier-Orfèvre ou Armurier, Astrologue, Devins, Sorcières), Arcanes Majeures (Enchanteur, Conjurateur, Thaumaturge, Nécromancien) et Mystique (Mots, Symboles, Figures et Nombres). En théorie, on ne choisit pas son école, elle est déterminée aléatoirement à partir de sa Classe sociale : les Serfs et les Paysans libres n'ont généralement accès qu'à la Magie Naturelle alors que les Bourgeois et les fils de Nobles tendent à plus aller vers les Arcanes.

En théorie, les Elfes des Bois de Chivalry & Sorcery sont spécialisés en Magie Naturelle Primitive (cf. p. 74). Ils enchantent un Arc elfique magique +2 qui leur sert de Focus (ils ont d'ailleurs +10% au tir à l'arc elfe). Chaque type de Magie conçoit son propre Focus, que ce soit un Bâton, une Boule de cristal, l'encre du Cabaliste ou les tarots du Cartomancien. Les Elfes des Bois connaissent instantanément certains sortilèges simples de perception (Détecter Magie, Détecter Pistes, Détecter Pièges, Détecter Portes, Sentir ce qui est caché, Détecter Observation, Trouver sa direction) et le rituel de Cercle de Protection. Ils sont décrits avant tout comme des "Forestiers" (l'équivalent dans C&S des "Rangers" de D&D). Il y a aussi une société secrète des Forestiers Libres, des Humains qui doivent défendre les forêts avec les Elfes et partager leurs pouvoirs intuitifs, mais il y a aussi une société militante dite des Grands Veneurs Royaux (symbole : un Cerf). Les Forestiers sont plus décrits dans le premier C&S Sourcebook (que je n'ai pas mais j'ai la version dans White Dwarf #9, octobre 1978, p. 20-22). Ils ont en plus des compétences semblables aux Voleurs mais dans la nature (se cacher en forêt, couvrir ses traces, escalade, pister, ouïe, sixième sens, dompter animaux, identifier plantes, chasser, pêcher).

L'ennui est qu'avec ses caractéristiques physiques (et notamment sa Dextérité minimale de 13), Indis ne ferait pas une très bonne Guerrière-Forestière et qu'elle serait sans doute meilleure en devenant Médium, Magicienne spécialisée dans les rapports avec les esprits (voir page 75).

De nouvelles Caractéristiques Magiques
Chaque école de Magie a sa caractéristique associée en plus de l'Intelligence. Pour les Médiums, c'est la Sagesse. Indis a une Intelligence de 13 et une Sagesse de 15. Cela lui donne un Niveau de Concentration de 2.8 si elle devient Médium débutant. Le maximum initial aurait été de 4.0 si elle avait eu 20 et 20.

Indis a aussi un Ascendant favorable (+0.5), est très pieuse (Alignement 3) et cela lui donne un Facteur Magique Personnel (PMF) de 3.3 (qui représente surtout son énergie pour contrôler les forces magiques). C'est relativement moyen (il faudrait des caractéristiques exceptionnelles mais on peut théoriquement dépasser un PMF de 10 dès le Niveau 1). Dans la seconde édition, ces facteurs dépendent aussi de la caractéristique nouvelle "Férocité", qui doit donc représenter aussi la force de la Volonté.

Un défaut de ces caractéristiques dérivées compliquées est qu'elles me semblent finalement avoir la plupart du temps (sauf cas vraiment extrême) bien moins d'importance que le Niveau du Magicien (il y a XXII Niveaux, comme les 22 Lames d'Arcanes Majeures du Tarot). En ce cas, à quoi bon vouloir tant détailler les différences individuelles à partir des Caractéristiques comme c'est presque toujours le Niveau général qui fera la différence ?

Dans la seconde édition, comme les caractéristiques sont réparties au lieu d'être tirées aux dés, il est plus possible d'optimiser un Magicien avec des caractéristiques maximales.

Comment jeter un Sort ?
Lancer un Sortilège coûte des Points de Fatigue et ce coût est en pourcentage du total de départ, ce qui signifie que la fatigue ne diminue pas avec les Niveaux : un Sort complètement maîtrisé et du même Niveau que le Mage coûte 10% du total de la Fatigue (5% si le Mage dispose d'un objet Focus personnel pour se concentrer). Mais un Sort non-maîtrisé ou d'un Niveau supérieur coûte 20% du total de départ.

Dès qu'on a dépensé tous ses Points de Fatigue, la charge passe aux Points de Corps, ce qui rend la Magie vite dangereuse pour peu que le Mage soit déjà épuisé ou blessé - surtout s'il n'a plus son Focus.

Dans C&S, il peut y avoir deux jets : un pour contrôler un Sort encore non-maîtrisé et un autre pour atteindre la cible. Chaque Sortilège qui n'a pas encore été complètement appris a une Résistance Magique de Base, qui est sa difficulté à être lancée, allant de 0 à 10. A chaque fois que le lancer de sort est une réussite, la Résistance baisse d'un point, jusqu'à 0. Mais à chaque échec, elle augmente à nouveau d'un point, jusqu'au maximum de 10, où le Sort devient trop difficile. A 0, le Sort est "maîtrisé" ou appris définitivement.

Le problème est alors d'expliquer pourquoi chaque personnage ne passe pas tout son temps entre les scénarios à faire "tomber" tous les nouveaux Sorts à une Résistance de 0 (surtout que la chance dépend du temps qu'on met dans le rituel). La règle complexe doit donc s'appliquer seulement en temps de jeu quand on tombe sur un nouveau Sort en cours de scénario, dans un rouleau de parchemin par exemple.

Un tableau fait correspondre le Niveau du Magicien et la Résistance : la probabilité de réussite de base est en gros (en fait, ce n'est pas si linéaire) égal à 20% + (Niveau du Mage x5) - (Résistance x5). Je me demande si Chaosium n'a pas tiré sa célèbre Table de Résistance de là ?

La probabilité est donc ridiculement basse (un Mage Niveau 1 a une base négative, - 25% de chance de base de lancer un Sort de Résistance 10), mais on peut augmenter ses chances par divers rituels. Par exemple, (1) en dépensant des Points de Fatigue supplémentaires (+1% seulement par Point), (2) en méditant (+1% x Niveau du Mage par jour de Méditation), (3) en jeûnant (+1% x Niveau du Mage par jour de Jeûne, ce qui est fatiguant et commence même à coûter des points de vie après Quarante Jours), (4) par un objet Focus (+10%), (5) par un Livre où le Sort est inscrit (+10%). Le Focus et le Livre de Sort ne sont donc pas obligatoires en jeu mais fortement conseillés.

Si la probabilité de base de lancer le sort était inférieur à 5% ou si la Cible avait une résistance magique particulière comme une Amulette ou un Cercle de Protection, tout échec entraîne en plus de l'accroissement de la Résistance un "Retour de Flammes" sur le lanceur (Backfire, p. 87). C'est sans doute l'une des premières tables d'échec critique de l'histoire du jeu de rôle mais elle est encore très simple :
01-50 le Mage perd 50% du total de ses Points de Fatigue
51-100 "Rebond" : un effet indésirable frappe le Mage (à déterminer par l'arbitre). 

Après la réussite du lancer du Sort, la cible aussi a droit à un jet de Résistance. Ici, après le côté assez moderne des autres règles, on a un Tableau de résistance (Table des Conflits Magiques, p. 86) très peu pratique et non-systématique qui dépend de la description de chaque cible.

Un exemple de Tradition : les Médiums

Donc je décide (avec l'accord du MJ qui n'est autre que moi-même) qu'Indis ne va pas rester une simple Elfe Forestière et qu'elle a pu accéder à la tradition des Médiums. Contrairement à la plupart des autres Mages des Arcanes de C&S, les Médiums n'ont pas besoin d'entrer dans une Société secrète, un "Ordre" ou une "Loge". Ils sont formés directement par un Esprit défunt d'un autre Mage, un Esprit appelé le "Guide".

Pour contacter des Esprits, le Médium doit choisir la durée de la Transe, qui est de plus en plus difficile, de plus en plus fatigante et qui a de plus en plus de chances de conduire à une Possession après la période critique dite "de danger". La Possession peut être temporaire mais il y a 5% de chances par tour que cela conduise à la Folie. En cas de Possession, il faut ensuite un exorcisme pour libérer le Médium (mais l'Esprit peut aussi s'y opposer).

Le Guide peut l'aider à contacter d'autres Esprits et il peut ainsi leur poser des questions et même apprendre des capacités ou des Sortilèges de ces Esprits, ce qui ferait donc du Médium la plus polyvalente de toutes les Classes de Personnage. En théorie, rien ne lui interdirait d'apprendre n'importe quelle autre technique d'autres Arts (du moins tant que cela ne contredirait pas son Alignement, pas de Nécromancie et Magie Noire).  

Le Médium peut de plus enchanter une Boule de Cristal où il peut placer 3 Sorts + 1 Sort supplémentaire tous les 4 Niveaux. Indis s'en servira comme Focus à la place de l'Arc habituel des Elfes, même si c'est moins facile à transporter.

Tirons les caractéristiques de l'Esprit-Guide d'Indis : Nicéphore était un humain mâle, noble (fils d'un Comte) et spécialisé dans une des Arcanes mineures : la Divination (Tarot). Il était né sous de Mauvaises Augures sous le Signe de la Vierge (un bon signe pour un Sorcier). Son facteur d'expérience est égal à 1d20 x 20 : 240, soit un Mage de Niveau XIII Adeptus Exemptus, PMF 28. D'après le Tableau de la page 66, cela signifie que ce Personnage-Joueur peut avoir retenu des Sortilèges jusqu'au Niveau VIII de Sort (mais j'ai la flemme de faire la liste). D'après la page 81, ce Devin a 79% de chances d'être correct dans ses prédictions les plus simples. Indis va donc pouvoir sans doute développer surtout des Sorts de Détection/Prémonition pour sa Boule de Cristal et apprendre à enchanter un jeu de Tarots. Si jamais elle dépassait un jour le Niveau XIII, elle devra sans doute chercher un nouveau Maître spirituel.

En revanche, Nicéphore est nettement plus ambigu moralement que l'austère Indis avec un Alignement de 14 (Nature neutre mais facilement corruptible). Le risque de Possession, voire de Folie, pourrait donc poser quelques problèmes si le Devin Nicéphore décidait de ne pas quitter le corps d'Indis après la période critique de la Transe médiumnique. Mais cela peut rendre leurs relations aussi plus intéressantes à jouer. Les règles de cette première édition de 1977 conseillent même que ce soit un des autres joueurs qui prennent le rôle de l'Esprit-Guide et développe son histoire passée, les circonstances de sa mort et sa personnalité (ce qui rappelle la règle sur l'Ombre dans Wraith).

En fait, Nicéphore "le Bateleur" était membre de la Société Mantique de l'Empire byzantin et servait l'Impératrice Irène d'Athènes (au VIIIe siècle). Il fut dénoncé par un de ses disciples, Agénor, et se vit voler son jeu de Tarots (un des plus anciens, qui servait d'archétype pour la Société Mantique). Il fut tué et finit au Purgatoire. Cela explique son ton méfiant maintenant qu'il a pris une nouvelle apprentie elfe pour retrouver son jeu où il espère se réincarner.

Toutes les illustrations ci-dessus (la Page, Prospero invoquant Ariel et la fée Viviane) sont d'Eleanor Fortescue (1879-1945). 

lundi 15 octobre 2012

Chevalerie & Sorcellerie (1)



Comme ce blog Skull Crushing for Greater Justice s'est amusé à créer un personnage en utilisant les règles de Chivalry & Sorcery 2e édition (et il annonce qu'il va ensuite comparer avec un autre personnage par la 1e édition), cela m'a donné envie de reprendre ce jeu de FGU, dont j'ai déjà donné une présentation de quelques univers.

La 1e édition de 1978, par Edward Simbalist (1943-2005) et Wilfried Backhaus (1946-2009), commencée comme options ajoutées à D&D dans l'Université de l'Alberta, se vante d'être le jeu de rôle fantastique le plus complet jamais réalisé et, pour une fois, ce slogan me semble plutôt véridique. Je connais peu de jeux qui pourraient autant se suffire à eux-mêmes en incluant dès 1978 divers systèmes pour créer des objets magiques, des règles pour gagner de l'influence à la Cour, des règles de wargames ou des règles pour construire son propre château ou son propre domaine (il n'y  peut-être guère que les règles de combats maritimes qui fassent défaut). Le jeu ne faisait qu'environ 128 pages mais rédigé dans un format si minuscule ("point 5") qu'il en ferait au moins trois fois plus dans une présentation normale.

C&S a connu 4 éditions officielles depuis 1978 et tout autant de "Guerres d'éditions" que les autres jeux (je ne compterai pas ici Land of the Rising Sun, la version japonaise par Lee Gold, ni Archaeron, une autre version auto-éditée par Wilf Backhaus seul en 1980). La première édition avait été si complexe que toutes les suivantes consistèrent en une simplification graduelle. En 1983, FGU publia une seconde édition remaniée, clarifiée, en ajoutant surtout un système de compétences, ce qui en fait un système intermédiaire entre les jeux de première et de seconde génération. Cela restait très proche de l'original mais on y avait peut-être déjà perdu un peu du fouillis glorieux de l'archétype.

Le jeu tomba ensuite dans un relatif oubli (du moins chez son éditeur FGU) et les deux auteurs le reprirent une douzaine d'années après dans un système unifié qui n'avait plus rien à voir à part le nom, la "3e édition" (1996). Cette 3e édition aurait été un jeu de rôle fantastique générique convenable mais elle avait perdu tout le charme exhaustif et encyclopédique des deux précédentes. Il y a peu de jeux de rôle où les jérémiades nostalgiques des Vieux Grognards sont aussi défendables que pour C&S. La 4e (édition dite de la "Renaissance", 2000, sans Backhaus, et le système simplifié de C&S Essence, 2011) est certes plus logique et cohérente mais peut décevoir pour les mêmes raisons : ce n'est plus qu'un jeu parmi d'autres et plus le monument ou l'archétype qui rivalisait avec D&D (voir la présentation dans Casus Belli n°5).

Illustration de Mike Gilbert (1947-2000)

Mais certains des fans et auteurs de C&S (notamment Wilf Backhaus contre Ed Simbalist, qui s'occupait de la 4e édition officielle) ont désapprouvé cette évolution, ce qui donne les éditions "pirates" actuelles (aussi appelées C&S 4th Red Book - rien à voir avec le livre de Jung) qui font l'objet de poursuites des éditeurs propriétaires du nom. C'est ce qu'on appelle improprement l'édition "5" (4bis ou "1.5"), qui est un retour à la première édition avec quelques ajouts. Depuis cette édition 5 a été à son tour amendée avec des compilations (comme les vieux suppléments Arden et Saurians) connues sous des noms de créatures : la 5 est "Phoenix", la 6e est "Chimera" et la toute récente 7e (rédigée après la mort de Wilf Backhaus) la "Gorgon" (489 pages).

Création de personnage 1e Edition


Je vais reprendre les règles en retentant de créer un personnage. C&S, même dans sa première version, la plus complexe, n'est pas complètement injouable - du moins quand si on ne joue pas un magicien. J'avais déjà créé sur ce blog un personnage pour Hârnmaster 3e édition (qui est un système proche de C&S sur bien des points malgré des influences de Runequest), et j'avais obtenu un mendiant pouilleux qui ne me donnait pas très envie de le jouer.

Dans C&S 1, contrairement à la 2e édition où on commence par tirer son Signe astrologique, on tire son espèce et son sexe (sauf les joueuses qui ont le droit de choisir). J'obtiens (contre toute attente car les probabilités sont basses) une Elfe. Appelons-la Indis. On verra son statut social ensuite.

Ensuite, les caractéristiques physiques importantes sont sa Taille et sa Carrure : elle est petite (5'1'', 1,55m) et très mince (pèse 90 "Dragons", soit environ 40 kg). Zut, il va vraiment falloir en faire une magicienne alors que je ne voulais pas lire ces règles sur les systèmes magiques.

Caractéristiques principales

Ensuite, C&S a les six caractéristiques habituelles de D&D (tirées avec 1d20 et non 3d6), plus trois caractéristiques originales Apparence, Voix Bardique et Alignement (où un score de 1 représente la sainteté et un score de 20 une nature radicalement diabolique - un Alignement élevé est d'ailleurs un bonus en Sorcellerie). C&S 2e édition ajouta une nouvelle caractéristique fondamentale, la Férocité (en gros, le Moral ou la Bravoure, capacité à devenir Berserk) et inversa l'Alignement en score de Piété (avec 1 Incroyant et 20 Pieux dévoué).

Cela donne (et je tiens à dire que j'ai vraiment tiré les dés dans l'ordre, il n'y a nul sexisme) :

    Dextérité 6 Maladroite -> montée à 13, minimum elfique
    Force 4 Chétive
    Constitution 4 Faible
    Apparence 17 Attirante
    Voix 13 Agréable, sans plus
    Intelligence 9 Moyenne -> montée à 13, minimum elfique
    Sagesse 15 Pénétrante
    Charisme 8 (avec un +1 de son Apparence)
    Alignement 3 ("Bonne")

On a clairement une intellectuelle déséquilibrée et je commence à l'imaginer plus comme une prêtresse ou mystique (Alignement très pieux et haute Sagesse) que comme une Magicienne (Intelligence moyenne). Mais certaines spécialités magiques (Médium, Devin et Carrés Sacrés) se fondent aussi sur la Sagesse, qui est son meilleur score. L'ennui est que C&S ne décrit pas vraiment la société elfique dans cette édition. Les caractéristiques sont trop faibles pour qu'Indis puisse être "qualifiée" comme une Noldo (Haute-Elfe), elle est donc une Sinda (Elfe des bois). Sa Dextérité et son Intelligence sont donc montés au minimum de son espèce, à 13 (il faut d'ailleurs une Intelligence minimale de 11 pour la Magie).

C&S avait deux systèmes de points de vie, les Points de Fatigue (en moyenne 3-4 par Niveau) et le Corps (dérivé de la Taille, de la Force, de la Constitution et de l'Intelligence). Les dégâts vont d'abord à la Fatigue et les réussites critiques frappent directement le Corps. Indis a droit à 8 Points de fatigue (1d6+3 au premier niveau d'une Elfe sylvestre) mais seulement 6 points de Corps (score de base des Elfes sylvestres, aucun bonus ni malus de ses caractéristiques).

Caractéristiques dérivées

Indis est si frêle qu'elle ne peut porter qu'un tiers de son poids, soit environ 27 "Dragons" (12 kilos).

Ensuite, on a deux caractéristiques qui n'ont un intérêt que si on joue les variantes Wargame (mais elles entrent dans la composition des caractéristiques de combat individuel). Sa Capacité militaire brute serait de 4 (mais comme elle ne fera pas carrière dans les armes, elle aura un malus de -2) et son Niveau de Commandement de 2 (réduit à 1).

Son Facteur de Combat (Personal Combat Factor, PCF) est égal à la formule lourde de "Carry Capacity/100 + Military Ability/2 + Dexterity/10 + Class Factor", ce qui donne 0,3 + 2 + 1,3 + 0,9 = 4,5 (Multiplicateur de dégâts 3, +5% à l'attaque avec armes légères et bonus -5% de défense/parade.

Autres données

C&S 1e édition cache les règles importantes sur l'Astrologie dans la section sur la Magie (page 80). Indis est née sous le Signe du Lion de bon augure (Well-Aspected, +5%) et c'est un Horoscope qui aurait été plus "martial" (bonus en expérience pour les carrières militaires) mais elle choisira quand même une carrière plus "spéculative" (si vous voulez le savoir, il vaut mieux être Scorpion pour optimiser ses chances de Magicien dans C&S).

Sa Classe sociale est Libre ("Yeoman"), Indis est une 3e fille et en plus le "Mouton noir" de sa famille. Je n'ai pas trouvé clairement quel était son patrimoine de départ. Je vais laisser de côté le calcul de son Influence sociale car cela dépendrait beaucoup de la campagne. Elle a une phobie, la toxicophobie (peur des poisons, amusant à jouer sans être vraiment un désavantage comme tous les personnages-joueurs sont un peu toxicophobes !).

Elle n'aura pas trop le choix, il va falloir qu'Indis se mette à la magie. Je n'ai pas vraiment envie d'en faire une Prêtresse catholique et les règles disent juste que les Elfes adorent Elbereth Gilthoniel. Une Elfe devra sans doute (cf. p. 74) se spécialiser en "Magie naturelle". On reviendra donc sur sa carrière thaumaturgique dans une autre note car cela ne dépendra pas entièrement de son libre choix.

Doux rêves, Personne


Google l'a déjà mis en "une" ce matin, mais cela fait 107 ans aujourd'hui (15 octobre 1905) qu'est paru le premier épisode de Little Nemo de Winsor McCay et la première tentative du petit pour atteindre le monde des Rêves. 

Cela m'étonne qu'on n'ait pas encore fait un cross-over avec Alice au Pays des Merveilles (à part par exemple cette illustratrice). En revanche, si on parle de cross-over, je crains qu'Olivier Rameau (de "Rêverose", par Greg & Dany) n'arriverait pas à s'acclimater à l'onirisme bien plus indomptable des Lettres de l'Atlantique de Fred.

dimanche 14 octobre 2012

Zut, juste quand j'avais décidé d'arrêter les comics

Une BD où Othello, Hamlet, Juliette, Falstaff et Prospero s'allient pour assassiner Shakespeare et lutter contre une alliance de Iago, Richard III et Lady Macbeth ? Ca a l'air encore mieux que LoEGFables, non ? Pourquoi personne ne m'en avait parlé alors que cela fait déjà deux ans qu'elle existe ?

Bon, cela dit, cette spécialiste du théâtre shakespearien a trouvé le style des dialogues complètement raté (d'autres sont plus nuancés, même si le scénario demeure un gimmick et que les auteurs ne sont certes pas Neil Gaiman).

jeudi 11 octobre 2012

[JDR] Contes trollatiques



  • Toute la blogosphère dite "Old School" ne parle plus que des controverses entourant Dwimmermount, le Donjon créé par "Grognardia", un des Papes du mouvement (et auteur professionnel prolifique). Il l'a fait financer sur Kickstarter, a reçu une somme record de dons (1000 personne pour un total d'environ 50,000$) mais a finalement dû reporter la publication d'encore un an suite à des problèmes personnels. Des sites entiers de Trolls comme YourDungeonIsSuck ou Dwimmerdust le harcèlent maintenant comme les GRRumblers attaquent GRR Martin parce qu'il retarderait le futur volume de Song of Fire & Ice.

    Mais un testeur vient de publier une review du prototype, exprimant une déception profonde vis-à-vis du contenu "minimaliste" du Donjon.

    L'ironie est que ce groupe de testeurs reproche au module d'être dénué d'épopée, ultra-"sobre", parsémé de salles vides d'un vrai château médiéval en ruines où il ne se passe rien et où on finit par s'ennuyer.

    Mais si on peut se permettre une comparaison religieuse (un peu déplacée comme l'auteur de Grognardia a l'air d'être un Catholique assez intransigeant sur ses autres blogs), c'est un peu comme si les premiers Réformés après quelques années finissaient par s'étonner de l'absence des rituels et sacrements du Catholicisme. Le Mouvement Old School (du moins tel que Grognardia voulait le théoriser) passe souvent son temps à dire qu'il refuse l'épopée héroïque et linéaire au nom d'un voyage picaresque, plus "terre à terre". Il se réclame d'un retour aux bases des Pulps avant notre époque de course en avant vers le superhéros et le jeu vidéo. Le minimalisme est censé produire plus de contraste où un tiers des salles doivent donner un effet de lente exploration patiente.

    Le risque est en effet un rythme un peu barbant (mais je ne suis pas amateur du Dungeoncrawling en général, si j'achetais Dwimmermount ce serait pour la création organique de l'extérieur du Donjon, pas pour l'intérieur).

  • Imaginos a relaté comment un des fans français de Call of Cthulhu avait insulté divers membres de la communauté cthulhuesque et avait ainsi causé le retrait de leurs scénarios en libre-accès. Le jeu de rôle est censé aider au dialogue mais les forums y sont tout aussi trollesques que pour d'autres hobbies.

    J'ai un petit cas de dilemme lié aux Trolls pour le jeu Arrows of Indra, jeu sur l'Inde védique. Le problème est que c'est écrit par un des plus célèbres Trolls de la ludosphère, "Nisarg" (son nom réel est facile à trouver désormais), qui s'est fait interdire de RPG.net après avoir traité tous les amateurs de jeux indie de "pourceaux" snobs bobos de gauche qui devaient être écartés parce qu'ils risquaient de condamner le jeu de rôle dans son ensemble. Il a depuis fondé son propre forum, RPGsite (où il signe du nom modeste de "RPGPundit"), qui semble notamment peuplé de nombreux autres Trolls bannis de RPG.net (et qui me semble avoir globalement quelques différences idéologiques avec ce dernier forum : en gros, RPGsite semble plus "conservateur" en politique et en esthétique, en moyenne, même s'il faudrait nuancer). D'un certain côté, je préférerais ne donner aucun argent à RPGPundit mais le thème du jeu est suffisamment rare pour que cela devienne attirant (les règles en revanche ont l'air de n'avoir aucun intérêt comme ce sera une variante de plus d'un quasi-rétroclone, je crois). RPGPundit a aussi un rétroclone d'Amber sur la mythologie grecque. 
  • mardi 9 octobre 2012

    [JDR] Ludogamie



    J'ignorais (ou avais oublié) ce détail historique que raconte Greg Stafford dans les commentaires sur le blog AD&D & Parenting (sujet qui a soudain pour moi une actualité nouvelle) : Greg Stafford (créateur de Chaosium en 1974, éditeur de Runequest, Call of Cthulhu...) et Scott B. Bizar (le créateur de FGU en 1975, éditeur de Chivalry & Sorcery, Bunnies & BurrowsVillains & Vigilantes...) étaient beaux-frères. Ils avaient tous les deux épousé deux sœurs, deux filles d'une certaine Rose Chun.

    Les deux compagnies commencèrent par des wargames plus ou moins fantastiques en 1975 : White Bear & Red Moon pour Stafford, Gladiators et son propre Royal Armies of the Hyborian Age pour FGU (avec Lin Carter).




    Greg Stafford était en Californie du côté de San Francisco, et Scott Bizar venait de l'Arizona (de Gilbert, dans la banlieue de Phoenix, il est depuis devenu prof d'histoire et sciences sociales juste à côté, à Mesa), Chaosium et FGU n'avaient pas vraiment d'interactions et d'après le commentaire, ne devaient pas particulièrement s'apprécier d'un point professionnel si Stafford se considérait comme un perfectionniste et trouvait que FGU publiait un peu tout et n'importe quoi.

    Chaosium avait inventé l'idée d'un système unique pour tous ses jeux alors que FGU développait un système ad hoc à chaque fois comme il n'y avait presque aucune coordination entre les auteurs (FGU semblait même parfois s'amuser à concurrencer ses propres jeux en en sortant plusieurs sur le même thème).

    Bizar était plus un wargamer qu'un rôliste (en plus de son jeu sur l'univers hyborien de Conan, il a rédigé un wargame sur le monde de Mongo en 1977 et un autre sur Barsoom en 1978 chez Heritage) et il ne participait pas vraiment directement aux règles alors que Stafford a non seulement créé l'univers de Glorantha pour Runequest mais développa ensuite son propre jeu arthurien Pendragon.

    Depuis, Stafford s'est retiré de Chaosium (qui se concentre sur Call of Cthulhu) et il s'occupe surtout de ses deux bébés, Glorantha et surtout Pendragon. Scott Bizar publie encore des réimpressions et quelques aventures nouvelles pour V&V, il se bat avec ses auteurs (notamment sur V&V) pour conserver les droits de ses anciens jeux publiés il y a 35 ans.

    Add. En regardant le logo de Chaosium du milieu des années 80 ci-dessus, je me souviens que j'aimais beaucoup cette fonte légèrement trop "large" qu'ils utilisaient sur Superworld et Ringworld. Quelqu'un connaît le nom de cette police ? Je crois que le jeu Star Trek de FASA l'utilisait aussi.

    Faire-part



    Ce blog a été négligé depuis deux semaines, ce qui correspond par coïncidence à l'âge exact de notre enfant, dont le pseudonyme sur ce Blog sera désormais "Mellon" (qui, comme chacun sait maintenant à cause des inscriptions d'ithildin en tengwar féänoriens dans le mode de Bélériand sur les Portes de Dürin, signifie "Ami" en Sindarin).

    L'accouchement s'est très bien passé, les parents sont en pleine Béatitude et Mellon commence à s'adapter à notre nouvelle maison, mais si jamais je publie dans les jours à venir des posts trop longs sur des jeux épuisés, il faudra aussitôt me dénoncer à la DDASS.

    Autre retranscription des tengwar :