jeudi 23 février 2012

Lettre écarlate



La nouvelle stratégie du Parti Républicain contre l'avortement dans certains Etats comme la Virginie était originale. Au lieu de chercher comme d'habitude à limiter l'avortement lui-même, par des droits du Foetus (ou de ce qu'ils considèrent comme étant déjà un Foetus même avant la 11e semaine - un autre texte virginien voulait définir la "personne" comme commençant "à la conception"), ils proposaient un nouvel angle qui était la "prise de conscience de la mère" : toute femme qui voudrait avorter serait contrainte par la loi de faire une échographie et d'entendre le battement de coeur avant d'avoir le droit de passer à l'acte.

Ce n'est donc pas vraiment une interdiction, plutôt une technique de persuasion ou, disons-le, d'intimidation. Cela devait se servir du cas singulier de la "Jurisprudence" Juno ("Je n'ai pas avorté quand on m'a dit qu'il avait déjà développé ses ongles") : si vous n'êtes pas prête à voir d'abord le coeur du futur individu en formation dans l'échographie, alors vous n'avez pas le droit moral d'exécuter cette vie.

C'était une voie assez ingénieuse pour prétendre laisser toute l'autonomie aux femmes tout en insultant cette autonomie directement (comme si les femmes qui avortent étaient toutes incapables de concevoir ce qu'elles font sans une image). C'était aussi se servir d'un moyen permis par la technique (l'échographie) pour tenter d'empêcher indirectement une autre possibilité permise par la technique (l'avortement médicalisé). Même si on n'est pas d'accord, on ne peut que trouver cela assez habile car les arguments ne sont plus exactement les mêmes que d'habitude.

Mais du moins, on pouvait toujours se dire que même dans l'utilisation d'instruments assez "invasifs" dans les premières semaines, cela n'impliquait pas une contrainte de regarder :


Mais Jon Stewart était en-deçà de la vérité : là où l'humiliation va encore plus loin que leur imposer l'acte même de l'échographie "transvaginale", c'est qu'elle était en effet une contrainte sur l'image (c'est le texte du projet de loi) :

A woman who refuses to look at the ultrasound would have to sign a statement, which along with a print of the image would become part of her medical file.

Si elle refuse de regarder l'image, on la mettrait dans son dossier médical toute sa vie, au cas où elle risquait de ne pas pouvoir ressentir de culpabilité sur le moment.

Devant les protestations, les Républicains de Virginie viennent de renoncer à l'obligation et le Gouverneur de Virginie a déclaré qu'il ne se rendait pas compte que l'échographie pouvait ainsi comporter un élément intrusif.

Add. Ce dessin de Matt Bors résume bien le contexte curieux des dernières discussions contre la contraception (comme ce comité sénatorial sans aucune femme).

Aucun commentaire: